ABSTRACT
A study of the influence of mesonephric mesenchyme on the Wolffian duct in birds using heterospecific associations
An in ovo experimental study of mesonephric mesenchyme-Wolffian duct relationships has been performed with special reference to the progression and the ramification of the Wolffian duct in quail-chick and quail-duck associations. Two methods are used to obtain chimaeric mesonephros in ovo. First, a piece of a quail blastoderm containing the tip of the Wolffian duct is grafted on to a chick blastoderm behind an obstacle. The obstacle is a small piece of shell membrane and it prevents the migration of the chick Wolffian duct. Second, chimaeric blastoderms are made by associating in ovo halves of quail blastoderm (anterior or posterior) with the complementary halves of chick or of duck blastoderms. The experiments are performed in such a way that the Wolffian ducts are in the anterior part and the nephrogenic blastemas in the posterior part. In those experiments in which a Wolffian duct of one species is associated with the mesonephric mesenchyme of another, the Wolffian duct grows backward above the intermediate cell mass without any participation of the heterospecific cells. In quail-duck associations, the Wolffian duct reaches the cloaca and buds off the ureteric diverticulum later than it does in quail-chick associations.
The mesonephric mesenchymal area induces the Wolffian duct to branch out into a collecing system. Quail Wolffian duct gives rise to more numerous collecting tubules than does the chick Wolffian duct. In quail mesenchyme-chick Wolffian duct mesonephros, the collecting tubules are not always present and often the tubules derived from the mesenchyme invade the wall of the Wolffian duct. In all cases only very short collecting tubules are derived from the Wolffian duct.
INTRODUCTION
Le mésonéphros, comme le métanéphros se forment aux dépens de deux ébauches, l’une épithéliale le canal de Wolff ou l’uretère, l’autre mésenchymale, le blastème mésoou métanéphrogène. Au cours du développement normal, le canal de Wolff suit étroitement la pièce intermédiaire. Si l’expérimentateur perturbe le trajet que le canal de Wolff emprunte au cours du développement normal, trajet désigné par Cambar (1952b) sous le terme de voie, le canal est en général arrêté; il arrive cependant qu’après un détour, il retrouve, en aval de la perturbation, la voie qui semble l’attirer. Ces travaux réalisés par Tung & Kü (1944), Holtfreter (1944), Cambar & Gipouloux (1956), Houillon (1956) n’ont porté que sur les Amphibiens. Chez les Oiseaux, on connaît les conséquences de l’interruption de la croissance du canal de Wolff (Boyden, 1924; Gruenwald, 1942; Bishop-Calame, 1966) et non les modalités de sa progression.
Dans la genèse du métanéphros, les expériences de Grobstein (1955), de Bishop-Calame (1966) et de Erickson (1968) montrent que le mésenchyme métanéphrogène induit l’ébauche urétérale à se ramifier. Selon Bishop-Calame le mésenchyme mésonéphrogène, et lui seul, peut être substitué au mésenchyme métanéphrétique pour promouvoir une croissance et une ramification typique de l’uretère. Etant donné la parenté embryologique entre mésoet métanéphros on peut se demander si le mésenchyme mésonéphrogène induit des ramifications dans le canal de Wolff et quelle est l’importance de la partie purement collectrice du rein embryonnaire (c’est à dire la partie dérivée du canal de Wolff). Chez les Oiseaux, les auteurs admettent en général l’existence de dérivés wolffiens mais leur accordent une importance variable: Turchini (1967) fait dériver du canal de Wolff l’ensemble du mésonéphros du Poulet; Abdel Malek (1950) décrit dans l’embryon de Poulet de 3,5 jours des tubules collecteurs issus du canal de Wolff, s’abouchant aux tubules secondaires et tertiaires du mésonéphros; pour Stampfli (1950) qui reconnaît dans le tube urinaire mésonéphrétique des Oiseaux quatre segments, le segment de connection, le segment moyen, le segment de transition et le segment principal sécréteur, c’est le segment de transition qui marque la réunion du dérivé wolffien et du dérivé mésenchymal. Après une étude histologique du mésonéphros de l’embryon de Poulet, Wendler (1966) affirme que le canal de Wolff n’émet aucune ramification et que l’épithélium des tubes issus du mésenchyme envahit la paroi du canal de Wolff et s’y substitue partiellement.
Devant la diversité des données descriptives relatives à l’importance des dérivées wolffiens une approche exprérimentale s’impose. Des caractéristiques nucléaires particulières aux cellules de Caille permettent de suivre dans des associations tissulaires hétérospécifiques Caille-Poulet, l’évolution de chacun des tissus (Le Douarin, 1969), et dans des mésonéphros chimères résultant de la combinaison in vitro d’un canal de Wolff de Caille à un mésonéphros de Poulet ou inversement, Gumpel-Pinot, Martin & Croisille (1971) montrent que la contribution du canal de Wolff à l’édification des tubes urinaires est peu importante.
Dans cet article qui développe les résultats exposés dans une note précédente (Martin, 1971), l’influence du mésenchyme néphrogène sur la croissance et les ramifications du canal de Wolff est étudiée au moyen de mésonéphros chimères Caille-Poulet et Caille-Canard réalisés in ovo.
MATERIEL ET METHODE
Trois espèces d’Oiseaux sont utilisées: des greffons de Caille japonaise (Coturnix coturnix japónica) sont implantés in ovo dans des embryons de Poulet (Gallus gallus) de race Leghorn blanche et de Canard Pékin (Anas platy rynchos).
Les greffons et les porte-greffes sont fournis par des embryons de deux jours d’incubation.
Les œufs sont ouverts selon la méthode recommandée par Wolff (1936). Quelques centimètres cube d’albumine sont prélevés au petit bout de l’œuf après deux jours d’incubation (5 cm3 pour les œufs de poule, 7 cm3 pour ceux de canne). Une fenêtre est découpée au-dessus de l’embryon.
Deux types d’opérations permettent le développement des mésonéphros chimères :
(1) Implantation d’un fragment d’embryon contenant l’extrémité du canal de Wolff
Des reins chimères Caille-Poulet sont réalisés en implantant un fragment d’embryon de Caille contenant l’extrémité du canal de Wolff, dans l’aire latérale d’un embryon de Poulet, en arrière d’un obstacle. L’obstacle destiné à arrêter la progression du canal de Wolfï de Poulet du côté opéré est un fragment de membrane coquillière inséré dans une fente de l’aire latérale (Bishop-Calame, 1966). Le greffon est implanté dans une deuxième fente pratiquée dans l’aire latérale en arrière de la première (Fig. 1). L’opération est pratiquée indifféremment du côté gauche ou droit de l’embryon.
Réalisation de reins chimères Caille-Poulet in ovo, par implantation d’un fragment de blastoderme de Caille contenant l’extrémité du canal de Wolfï dans un embryon de Poulet, en arrière d’un obstacle. L’obstacle (ob) arrête la progression du canal de Wolff de Poulet; le canal de Wolff de Caille peut migrer dans la partie postérieure de Poulet.
Réalisation de reins chimères Caille-Poulet in ovo, par implantation d’un fragment de blastoderme de Caille contenant l’extrémité du canal de Wolfï dans un embryon de Poulet, en arrière d’un obstacle. L’obstacle (ob) arrête la progression du canal de Wolff de Poulet; le canal de Wolff de Caille peut migrer dans la partie postérieure de Poulet.
(2) Réalisation d’embryons chimères
Ces chimères Caille-Poulet (Fig. 4A) ou Caille-Canard résultent de l’association d’un hémi-embryon antérieur d’une espèce possédant intégralement ses canaux de Wolff à un hémi-embryon postérieur de l’autre espèce qui ne contient pas encore ses propres canaux de Wolff. Un embryon de Caille est donc disséqué dans le liquide de Tyrode et on prélève la région antérieure (Fig. 2A) ou la région postérieure (Fig. 2B). Ce greffon est transporté à la pipette et déposé dans l’œuf à la surface du blastoderme receveur. La membrane vitelline du blastoderme porte-greffe est déchirée; une partie de l’embryon receveur est excisée: soit la partie antérieure (Fig. 2A), soit la partie postérieure (Fig. 2B). Les deux parties complémentaires du greffon et du porte-greffe sont associées par une suture: on coupe ensemble, aux ciseaux de Pascheff, les bords du greffon et du blastoderme receveur.
Réalisation in ovo d’embryons chimères Caille-Poulet ou Caille-Canard. (A) La partie antérieure d’un embryon de Poulet ou de Canard est excisée; on la remplace par un hémi-embryon antérieur prélevé sur un blastoderme de Caille. (B) Un embryon chimère peut également être constitué en substituant à sa partie postérieure une partie postérieure de Caille. Le niveau de la suture est tel que les canaux de Wolff sont présents dans l’hémi-embryon antérieur et absents dans l’hémi-embryon postérieur: ainsi les canaux de Wolff issus de la région antérieure peuvent migrer dans un territoire néphrogène hétérospécifique.
Réalisation in ovo d’embryons chimères Caille-Poulet ou Caille-Canard. (A) La partie antérieure d’un embryon de Poulet ou de Canard est excisée; on la remplace par un hémi-embryon antérieur prélevé sur un blastoderme de Caille. (B) Un embryon chimère peut également être constitué en substituant à sa partie postérieure une partie postérieure de Caille. Le niveau de la suture est tel que les canaux de Wolff sont présents dans l’hémi-embryon antérieur et absents dans l’hémi-embryon postérieur: ainsi les canaux de Wolff issus de la région antérieure peuvent migrer dans un territoire néphrogène hétérospécifique.
Après l’intervention chirurgicale, l’œuf est scellé au ruban adhésif et remis en incubation. A l’autopsie, les pièces sont fixées dans le liquide de Carnoy, incluses dans la paraffine, coupées à 7 μm et colorées au réactif de Feulgen.
RESULTATS
Pour évaluer l’importance d’un éventuel traumatisme opératoire, on a comparé dans une première série expérimentale la progression des canaux de Wolff dans des embryons chimères Poulet antérieur-Poulet postérieur et dans des embryons de Poulet témoins. Les œufs témoins ont été incubés et ouverts comme les œufs opérés; durant l’opération des embryons expérimentaux, les œufs témoins sont également restés hors de la couveuse. Les embryons expérimentaux et témoins ont été autopsiés 27, 30, 42 et 45 h après l’intervention (Tableau 1). Dans les embryons témoins et expérimentaux fixés 27 h après l’opération les canaux de Wolff qui ont progréssés en direction caudale sont arrivés à proximité de l’intestin postérieur mais ne s’y raccordent pas toujours. Le raccordement à l’intestin postérieur du canal de Wolff devient la règle dans les embryons témoins fixés 30 h et plus après l’intervention. Toutefois l’établissement d’une lumière continue entre le canal de Wolff etle cloaque se fait un peu après que les épithéliums du canal et de l’intestin postérieur soient entrés en contact. Les embryons expérimentaux diffèrent des embryons témoins par le fait que dans quelques cas la progression du canal de Wolff est retardée: il arrive que 42 et 45 h après l’opération le canal de Wolff n’a pas rejoint l’intestin postérieur.
L’étude des mésonéphros chimères Caille-Poulet et Caille-Canard porte sur 61 embryons opérés selon la technique de réalisation d’embryons chimères (Caille antérieure-Poulet postérieur: 6 cas; Poulet antérieur-Caille postérieure: 33 cas; Caille antérieure-Canard postérieur: 7 cas; Canard antérieur-Caille postérieure: 2 cas) ou d’implantation d’un fragment de blastoderme de Caille (13 cas), autopsiés entre 1 et 14 jours après l’opération et présentant un rein ou des reins chimères.
Progression du canal de Wolff
Au cours d’expériences de réalisation de reins chimères Caille-Poulet ou Caille-Canard, il arrive que le canal de Wolff soit arrêté à la cicatrice; cette éventualité se rencontre très souvent lorsque nous utilisons la technique d’implantation d’un fragment d’embryon contenant l’extrémité du canal de Wolff; mais elle ne s’observe qu’une fois sur deux environ avec la technique de réalisation d’embryons chimères. Lorsque le canal de Wolff est bloqué à la cicatrice, il n’atteint pas le mésenchyme mésonéphrogène hétéro spécifique. Ce mésenchyme néphrogène postérieur à la cicatrice ne développe pas de tubules.
Dans les associations Caille-Poulet effectuées selon l’une ou l’autre technique, lorsque le canal issu de la région antérieure franchit la cicatrice, on peut observer, 24 h après l’opération, que la migration en direction caudale emprunte la voie typique: le canal de Wolff est sous-jacent à l’ectoderme et tangent aux somites, à la pièce intermédiaire et à la lame latérale de la partie postérieure. Bientôt des ponts cellulaires entre somites et lame latérale recouvrent le canal de Wolff qui se trouve ainsi progressivement enfoncé dans le mésoderme ventral entre le mésenchyme néphrogène, la veine cardinale postérieure et la paroi coelomique. Le canal poursuit sa migration légèrement au-delà du cloaque. 11 se raccorde à une corne d’origine endodermique, 48 h après l’opération. Après s’être raccordé au cloaque, le canal de Wolff émet le bourgeon urétéral. Le débouché de l’uretère se fait donc, au début, dans le canal de Wolff (Fig. 4B), puis il recule. Quatre jours au moins après l’opération, l’uretère et le canal de Wolff s’abouchent au cloaque en deux points adjacents. Le mouvement de recul de l’extrémité de l’uretère se poursuit et le 7ème jour, le canal de Wolff et l’uretère s’abouchent séparément au cloaque.
Cette séquence d’évènements dans les associations Caille-Poulet, qui mime le développement normal du rein d’Oiseau, n’a pas toujours été observée dans les associations Caille-Canard. Des anomalies ont été constatées:
– Dans cinq cas, le canal de Wolff issu de la région antérieure, a commencé sa migration dans la partie postérieure, mais s’est arrêté loin du cloaque. Les chimères ont été fixées 2 et 3 jours après l’opération. Des tubes mésonéphrétiques ont été induits dans la partie postérieure et se raccordent aux canaux de Wolff qui sont extrêmement dilatés.
– Dans deux associations fixées 3 jours après l’opération, les canaux de Wolff de Caille ont achevé leur migration, mais, bien que passant très près du cloaque de Canard, ils ne s’y raccordent pas. Des tubes se sont différenciés dans le mésenchyme mésonéphrogène de Canard et le canal de Wolff de Caille présente, comme dans les cas précédents, un aspect dilaté.
– Dans un cas, le canal de Wolff de Caille s’est raccordé à l’endoderme cloacal de Canard mais n’a pas émis de bourgeon urétéral.
On peut tirer plusieurs conclusions de ces expériences:
– Le canal de Wolff pousse par son bout libre sans que les cellules bordant sa voie contribuent à sa structure.
– La région de la pièce intermédiaire est une voie privilégiée pour le canal de Wolff qui semble incapable de suivre longtemps un autre trajet (la fréquence des échecs dans la tentative de réalisation des reins chimères par la première méthode est peut-être imputable à un trop grand éloignement entre le canal greffé et la voie).
– La ‘corne cloacale’ a pour origine l’endoderme de la région postérieure.
– Il ne semble pas qu’il y ait de phénomènes d’incompatibilité entre tissus des diverses espèces d’Oiseaux associés.
– Enfin les divers degrés d’anomalies du développement des mésonéphros Caille-Canard semblent résulter d’un manque d’affinité entre cellules de Caille et cellules de Canard.
Effets sur les ramifications
Les points suivants ont pu être dégagés :
– 24 h après Vopération, la lumière du canal de Wolff est discontinue. Le canal de Wolff ne se raccorde pas à l’endoderme. Les vésicules qui se sont différenciées dans la partie antérieure du blastème néphrogène n’entrent pas en relation avec le canal de Wolff. A ce stade le canal de Wolff n’est pas ramifié quel que soit le type de l’intervention réalisée.
– 48 h après l’opération la différenciation du mésenchyme est plus avancée dans la région antérieure que dans la région postérieure. Dans la partie caudale du blastème on observe des condensations de cellules alors que dans sa partie céphalique des tubes se sont formés dont certains s’abouchent au canal de Wolff. Des différences apparaissent dans la morphologie du canal de Wolff selon le type de l’association (Tableau 2). Quand le canal de Wolff est de nature Poulet dans un mésenchyme de Caille il se raccorde au cloaque. Le bourgeon urétéral n’est pas encore formé. Le canal de Wolff n’émet de diverticule que dans la région tout à fait céphalique du rein, dans la zone où les tubes issus du mésenchyme sont reliés à des glomérules externes. Quand le canal de Wolff est de nature Caille dans un mésenchyme de Poulet il se raccorde au cloaque et manifeste sa capacité à se ramifier en formant des tubes collecteurs dans le mésonéphros et un bourgeon urétéral. En revanche, associé à un mésenchyme de Canard, le canal de Wolff ne se raccorde pas au cloaque, n’émet pas de ramification. L’association réciproque canal de Canard-mésenchyme de Caille ne présente pas davantage de diverticule.
– 3 jours après l’opération la tubulogenèse a gagné l’ensemble du blastème. Dans les associations Caille-Poulet les canaux de Wolff ont émis les uretères et des diverticules collecteurs mésonéphrétiques. Dans les associations Caille antérieure-Canard postérieur (6 cas) le raccordement au cloaque n’a été observé qu’une fois. Un seul canal de Caille a émis un uretère, mais tous les canaux de Wolff de Caille se sont ramifiés dans le mésenchyme mésonéphrogène de Canard en un système collecteur.
Ce n’est que 4 jours après l’opération que le raccordement au cloaque et l’émission de l’uretère sont réalisés dans ce type d’association Caille antérieureCanard postérieur.
Examinons les ramifications du canal de Wolff dans les divers mésonéphros chimères d’embryons de 5 jours et plus (Fig. 3). Dans un même embryon, la répartition céphalo-caudale des tubes se raccordant directement au canal de Wolff et des tubes collecteurs issus du canal est assez homogène : il n’y a pas de différence entre le segment faisant face aux gonades et le segment postérieur du mésonéphros. En revanche il y a une différence frappante entre le nombre des dérivés wolffiens de Caille et de Poulet:
Représentation des raccordements des tubes issus du mésenchyme au canal de Wolff dans des combinaisons hétérospécifiques : dans la partie postérieure d’embryons chimères de 6 jours d’incubation, on a recensé la succession antéropostérieure des raccordements des différents tubes primaires, secondaires et tertiaires issus du mésenchyme au canal de Wolff en notant la présence ou l’absence de dérivés wolffiens. (A) Embryon chimère Poulet antérieur-Caille postérieure. (B) Embryon chimère Caille antérieure-Poulet postérieur. (C) Embryon chimère Caille antérieure-Canard postérieur. On remarque que dans l’association canal de Wolff de Caille-mésenchyme de Poulet ou de Canard, les diverticules wolffiens sont presque toujours présents. En revanche dans l’association mésenchyme de Caillecanal de Wolff de Poulet, les dérivés wolffiens sont rares. La paroi des tubes issus du mésenchyme s’abouche directement au canal de Wolff ou même envahit une partie de la paroi du canal.
Représentation des raccordements des tubes issus du mésenchyme au canal de Wolff dans des combinaisons hétérospécifiques : dans la partie postérieure d’embryons chimères de 6 jours d’incubation, on a recensé la succession antéropostérieure des raccordements des différents tubes primaires, secondaires et tertiaires issus du mésenchyme au canal de Wolff en notant la présence ou l’absence de dérivés wolffiens. (A) Embryon chimère Poulet antérieur-Caille postérieure. (B) Embryon chimère Caille antérieure-Poulet postérieur. (C) Embryon chimère Caille antérieure-Canard postérieur. On remarque que dans l’association canal de Wolff de Caille-mésenchyme de Poulet ou de Canard, les diverticules wolffiens sont presque toujours présents. En revanche dans l’association mésenchyme de Caillecanal de Wolff de Poulet, les dérivés wolffiens sont rares. La paroi des tubes issus du mésenchyme s’abouche directement au canal de Wolff ou même envahit une partie de la paroi du canal.
(A) Embryon chimère Caille-Poulet de 13 jours d’incubation réalisé en associant une partie antérieure de Poulet de 23 paires de somites à une partie postérieure de Caille de 19 paires de somites, × 2,86.
(B) Coupe à travers un embryon chimère résultant de l’association d’une partie antérieure de Caille de 10 paires de somites à une partie postérieure de Poulet de 13 paires de somites, fixé 3 jours après l’opération. Le canal de Wolff (cw) issu de la région antérieure a migré dans la partie postérieure de Poule; il se raccorde à une corne endodermique cloacale de Caille et émet un uretère (u). Les flèches indiquent la limite entre structures dérivées de la Caille et du Poulet, × 288.
(C) Cette coupe à travers un embryon chimère Poulet antérieur-Caille postérieure fixé 3 jours après l’opération illustre une situation fréquente dans les mésonéphros chimères où sont associés un canal de Wolff de Poulet et un mésenchyme de Caille: le canal de Wolff de Poulet émet un court diverticule en direction d’un tube tertiaire (t3) issu du mésenchyme de Caille, alors qu’un tube primaire de Caille (t1) s’abouche directement au canal et que l’épithélium de ce tube primaire se substitue partiellement à la paroi du canal de Wolff de Poulet. Les flèches indiquent la limite entre structures dérivées du Poulet et celles dérivées de la Caille, × 540.
(D) Coupe à travers un embryon chimère Caille antérieure-Canard postérieur. Quatre jours après l’opération le diverticule wolffien de Caille est court par rapport au tubule mésonéphrétique de Canard que l’on voit ici sectionné sur toute sa longueur par le plan de la coupe. Les flèches indiquent la limite entre structures dérivées de la Caille et du Canard, × 360. cw. canal de Wolff; g :glomérule
(A) Embryon chimère Caille-Poulet de 13 jours d’incubation réalisé en associant une partie antérieure de Poulet de 23 paires de somites à une partie postérieure de Caille de 19 paires de somites, × 2,86.
(B) Coupe à travers un embryon chimère résultant de l’association d’une partie antérieure de Caille de 10 paires de somites à une partie postérieure de Poulet de 13 paires de somites, fixé 3 jours après l’opération. Le canal de Wolff (cw) issu de la région antérieure a migré dans la partie postérieure de Poule; il se raccorde à une corne endodermique cloacale de Caille et émet un uretère (u). Les flèches indiquent la limite entre structures dérivées de la Caille et du Poulet, × 288.
(C) Cette coupe à travers un embryon chimère Poulet antérieur-Caille postérieure fixé 3 jours après l’opération illustre une situation fréquente dans les mésonéphros chimères où sont associés un canal de Wolff de Poulet et un mésenchyme de Caille: le canal de Wolff de Poulet émet un court diverticule en direction d’un tube tertiaire (t3) issu du mésenchyme de Caille, alors qu’un tube primaire de Caille (t1) s’abouche directement au canal et que l’épithélium de ce tube primaire se substitue partiellement à la paroi du canal de Wolff de Poulet. Les flèches indiquent la limite entre structures dérivées du Poulet et celles dérivées de la Caille, × 540.
(D) Coupe à travers un embryon chimère Caille antérieure-Canard postérieur. Quatre jours après l’opération le diverticule wolffien de Caille est court par rapport au tubule mésonéphrétique de Canard que l’on voit ici sectionné sur toute sa longueur par le plan de la coupe. Les flèches indiquent la limite entre structures dérivées de la Caille et du Canard, × 360. cw. canal de Wolff; g :glomérule
– Dans l’association mésenchyme de Poulet-canal de Wolff de Caille, les canaux collecteurs sont nombreux. Dans certains de ces mésonéphros-chimères tous les tubes s’abouchent au canal de Wolff de Caille par l’intermédiaire d’un canal collecteur issu du canal de Wolff; dans d’autres il existe quelques tubes issus du mésenchyme et qui se raccordent directement au canal de Wolff Cette modulation de la réponse du canal de Caille ne semble pas être liée au stade.
– Dans l’association mésenchyme de Canard-canal de Wolff de Caille, les tubes collecteurs sont nombreux: que le canal de Wolff de Caille soit associé à un mésenchyme de Poulet ou à un mésenchyme de Canard, il donne naissance à un système collecteur présentant des caractéristiques analogues.
– Quand le canal de Wolff de Poulet est associé au mésenchyme néphrogène de Caille, les dérivés wolffiens sont peu nombreux. En général ils drainent des tubes tertiaires ou secondaires. Les tubes issus du mésenchyme de Caille communiquent avec le canal de Wolff de Poulet selon trois modalités:
– Les tubes s’abouchent à des diverticules de Poulet (Fig. 4C).
– Les tubes s’abouchent directement au canal.
– Les tubes s’abouchent au canal et la paroi du tube de Caille envahit une partie du canal de Wolff de Poulet (Fig. 4C). A cinq jours on peut quelquefois observer que l’épithélium du tube enrobe par l’extérieur l’épithélium du canal. Sur un petit segment on voit donc les deux épithéliums superposés. Aux stades ultérieurs on ne voit plus cette superposition: les deux épithéliums de Caille et de Poulet s’affrontent, ce qui laisse supposer que la partie de l’épithélium de Poulet située entre la lumière et l’épithélium de Caille a dégénéré. Mais quels que soient le stade et le nombre des tubes urinaires envahissant le canal de Wolff, le canal garde son intégrité dans le segment compris entre le mésonéphros et le cloaque.
Dans tous les types d’associations réalisés les dérivés wolffiens sont toujours très courts (Fig. 4D). Leur longueur ne semble pas augmenter au cours de la différenciation embryonnaire: dans tous les mésonéphros chimères de 15 à 16 jours les dérivés wolffiens restent presque toujours à l’intérieur de la zone voisine du canal où du mésenchyme reste condensé.
Le raccordement des tubes entre eux se fait selon des modalités diverses :
– Très souvent un même dérivé wolffien draine plusieurs tubes: deux, trois ou plus.
– Quelquefois deux tubes collecteurs convergent vers un même tube issu du mésenchyme.
– Il existe des cas d’anastomoses entre les tubes qu’ils soient issus du mésenchyme ou du canal.
– Enfin il existe des bifurcations dans les tubes issus du mésenchyme.
DISCUSSION ET CONCLUSION
La progression du canal de Wolff par son bout libre a été établie chez les Oiseaux et les Amphibiens par des travaux expérimentaux, et notamment ceux de Boyden (1924), de Burns (1934), de Waddington (1938), de O’Connor (1938), de Van Geertruyden (1942), de Gruenwald (1942), de Holtfreter (1944), de Nieuwkoop (1948) et de Cambar (1952a); Cependant l’origine de la partie postérieure du canal a longtemps été controversée. Selon O’Connor (1939,. 1940), Fox & Hamilton (1964), un diverticule issu de la partie postérieure de l’embryon participe à la formation de l’uretère primaire. Selon Boyden (1924), Gipouloux (1956), Bishop-Calame (1966), même la partie caudale du canal est issue de l’ébauche antérieure. L’observation des reins chimères Caille-Poulet ou Caille-Canard confirme que l’ensemble du canal de Wolff se constitue aux dépens d’une ébauche issue de la région pronéphrétique de l’embryon.
Dans les embryons opérés qui présentent des reins chimères le canal de Wolff, au. cours de sa progression, emprunte une voie précise, la pièce intermédiaire. Ce résultat rejoint les conclusions de Tung & Kü (1944), de Holtfreter (1944), de Cambar & Gipouloux (1956) et de Houillon (1956) relatives aux Amphibiens.
Le canal de Wolff peut progresser dans un territoire néphrogène hétérospécifique sans que se manifestent des phénomènes d’incompatibilité entre tissus des diverses espèces d’Oiseaux associés. Ceci est en accord avec les résultats d’associations d’organes embryonnaires de classes zoologiques differentes en culture in vitro (Grobstein & Younger, 1949; Wolff & Weniger, 1954) ou en greffe in ovo (Pugin, 1973). Une situation moins favorable à la greffe d’organes embryonnaires s’est présentée à Cambar & Gipouloux (1970): un fragment d’uretère primaire de Grenouille agile ou de Discoglosse implanté en situation typique dans un Crapaud commun est souvent histolysé et n’effectue jamais de migration en direction caudale; selon Cambar & Gipouloux les facteurs déterminant la migration des cellules de l’uretère primaire chez les Anoures sont donc spécifiques d’espèce.
Si une incompatibilité entre les divers tissus embryonnaires d’Oiseaux n’a pas été décelée, des anomalies dans le développement des reins Caille-Canard semblent révéler un manque d’affinité entre tissus de Caille et de Canard. Le canal de Wolff de Caille émet le diverticule urétéral à 4 jours dans un territoire Poulet et à 5 jours dans un territoire Canard; ainsi l’émission de l’uretère ne dépend pas des seules propriétés du canal de Wolff, il faut que celui-ci atteigne la partie postérieure du tronc. Au rôle que le mésenchyme néphrogène joue dans la progression du canal de Wolff, il semble que s’ajoute celui d’induire la formation du bourgeon urétéral.
Un autre signe de l’influence du mésenchyme néphrogène sur le canal de Wolff est la formation du système collecteur du mésonéphros. Les diverticules wolffiens sont toujours courts à tous les stades étudiés. Leur nombre n’obéit pas à une loi: dans certaines associations ils sont toujours présents, dans d’autres ils sont rares et la paroi du canal est envahie par l’épithélium des tubes issus du mésenchyme. D’une association à l’autre il y a des fluctuations. Certaines tendances peuvent cependant être dégagées: le canal de Wolff de Caille émet plus de diverticules que le canal de Poulet; les diverticules secondaires et tertiaires sont plus nombreux que les primaires. Dès lors que tous les tubes se sont formés dans le mésenchyme, ni le stade, ni le niveau dans le mésonéphros ne semble influencer le nombre et la répartition des tubes collecteurs issus du canal de Wolff.
Il semble que la vitesse relative de développement du canal et du mésenchyme mésonéphrétique règle le nombre et la direction des dérivés wolffiens. Ainsi le canal de Wolff de Caille présenterait un développement plus rapide que le canal de Wolff de Poulet: les dérivés wolffiens de Caille sont plus nombreux que ceux de Poulet. Dans l’association canal de Wolff de Poulet-mésenchyme de Caille les tubes collecteurs issus du canal sont en général dirigés vers les tubes tertiaires, c’est-à-dire vers les tubes qui apparaissent tardivement; les tubes primaires qui se forment précocement, se raccordent directement au canal de Wolff.