ABSTRACT
In an attempt to examine the factors acting during the morphogenesis of the tracheal system in the Diptera (Calliphoridae), various experiments were performed in larvae and pupae so as to modify the relations between the organs and their tracheal supply.
The results are as follows :
Implanted larval organs attract additional tracheal branches. This illustrates the abilities of the tracheal system to adapt itself to new needs.
Extirpation of larval organs suppresses the growth of all secondary tracheae destined for them, whereas the main tracheae are normal. It is concluded that the basic pattern of main tracheae is determined before metamorphosis and that, to this, secondary tracheae are added, whose origins, numbers and diameters correspond to the requirements of the various organs.
The attractive factor designated here as a ‘tissue factor’ produced by the organs is linked to their metabolic activities. In fact, the implantation of a killed organ or of an artificial body has no attractive action upon the tracheoblasts.
Ablation or X-irradiation of a cluster of tracheoblasts causes the absence of the corresponding tracheal unit. However, there is an effective compensation by the organs concerned for this loss, through formation of new tracheae or deflection of tracheae from neighbouring units.
It is clear that within certain experimental conditions the attractive power of an organ is effective at a great distance. So, it may be assumed that the tissue factor is a chemical substance produced by some cellular mechanism under those conditions of partial anaerobiosis which occur in the nymphal stage of Calliphoridae. This factor is thought to be inactivated or metabolized by the growing tracheoblasts.
There is no necessity for tissue contact between organs and tracheal epithelium in order to induce the formation of tracheae and tracheoles. The attraction is exerted at a distance.
The nodal regions have no part in the coordination of tracheal growth in the Calli-phoridae. In fact, they are histolysed during metamorphosis.
INTRODUCTION
Les travaux descriptifs du système trachéen sont nombreux mais il existe peu d’études expérimentales concernant les facteurs intervenant au cours de sa morphogenèse et souvent elles ne représentent qu’un aspect secondaire des recherches entreprises. Il en résulte une somme de connaissances partielles du fait de la diversité des expériences réalisées et des espèces étudiées. C’est pourquoi j’ai réalisé des expériences d’ablations, de greffes et d’irradiations chez les Diptères Calliphoridés.
Il existe dix paires d’unités trachéennes chez l’insecte deux thoraciques et huit abdominales, matérialisées extérieurement par dix paires de stigmates formés chez l’embryon par des invaginations de l’ectoderme. Par la suite les stigmates peuvent être fonctionnels ou non.
Au cours de l’évolution des insectes, des jonctions se sont établies d’une part entre les deux unités d’un segment et d’autre part entre les unités successives, de segment à segment. Il s’est ainsi formé deux troncs trachéens longitudinaux latéro-dorsaux, doublés par la suite, partiellement ou complètement, par une deuxième formation parallèle.
Au niveau des troncs trachéens longitudinaux et au point de jonction de deux unités, il existe une discontinuité dans le calibre et la structure de la taenidie trachéenne. Cette discontinuité peut être dénommée ‘noeud trachéen’ principal pour la distinguer des formations accessoires qui consistent en anneaux de cément permettant la jonction de l’épithélium trachéen du nouveau stade avec les trachéoles du stade précédent et qui sont désignées par le même nom par Wigglesworth (1954) chez l’Hétéroptère Rhodnius.
Au cours du développement larvaire, l’épithélium trachéen suit le cycle de mue. Chez les Hétérométaboles, les cellules trachéennes se multiplient par mitoses et persistent chez l’adulte sans histolyse. L’étude entreprise par Wigglesworth (1954) chez Rhodnius montre que le système trachéen croît par formation de nouvelles trachées et trachéoles à partir des trachées déjà existantes. Ce processus se retrouve chez les Holométaboles inférieurs, mais, chez les plus évolués, comme par exemple les Diptères Calliphoridés, les cellules larvaires s’histolysent alors que des trachéoblastes construisent le système trachéen imaginai (Pihan, 1968). Dans tous les cas il en résulte la mise en place d’un réseau trachéen, caractéristique de chaque espèce par ses ramifications, mais conservant le plan de base des unités trachéennes.
Ces données anatomiques permettent de penser qu’au cours de sa morphogenèse le système trachéen suit un plan déterminé réalisant l’harmonie entre l’activité physiologique des organes et leur trachéation. Selon Miller (dans Rockstein, 1964) tout se passe comme si les trachées prévoyaient les demandes en air exigées par les organes.
Les recherches expérimentales publiées jusqu’à présent tendent à tester les possibilités d’adaptation du système trachéen.
Les expériences de Smart (1956) sur les trachées alaires des Blattidés prouvent que leur trajet n’est pas immuable. Les expériences portant sur la régénération des pattes (O’Farrell & Stock, 1958) ou sur la réalisation de greffes alaires (LeFeuvre, 1969) ont montré que le système trachéen reconstitué et fonctionnel ne correspondait pas au système normal par son origine et son tracé.
De nombreuses expériences réalisant une modification dans l’anatomie normale de l’insecte ont prouvé que le système trachéen pouvait s’adapter en satisfaisant à des exigences variées. Il en est ainsi après suppression des trachées d’un territoire ou après une blessure tégumentaiie chez Rhodnius (Wigglesworth, 1954, 1959, 1961); après implantation de glandes endocrines chez Rhodnius (Wigglesworth, 1954, 1961) et chez Calliphora (Possompes, 1953); après implantation de disques imaginaux chez Calliphora (Darchis, 1964), de gonades chez Galleria (Allegret & Panon, 1969) de cellophane non stérile chez Locusta (Matz, 1966).
Des modifications quantitatives et qualitatives du courant gazeux respiratoire ont été provoquées directement soit par obstruction des stigmates à la paraffine (Locke, 1958 a chez Tenebrio), soit par variations dans la concentration en O2, CO2 ou N de l’air inspiré (Wigglesworth, 1954; Locke, 1957 chez Rhodnius) soit encore indirectement par application de pyrogallol sur une blessure (Wigglesworth, 1959, 1961). Ces différentes techniques ont mis en évidence que les basses pressions en oxygène augmentent le nombre des ramifications trachéennes en même temps qu’elles provoquent une croissance orientée vers les régions déficientes en oxygène. Au niveau des cellules déficientes en oxygène, il y a émission de fins pseudopodes vers les trachéoles les plus proches et déplacement de ces dernières vers la région déficiente (Wigglesworth, 1959,1961, 1965). Par cette émission de pseudopodes, ces cellules se comportent alors comme certaines cellules embryonnaires (Trinkaus, 1969). Tous ces faits dénotent une certaine souplesse du système trachéen et posent le problème de la coordination de la croissance trachéenne. Chez Rhodnius, Locke (1958 b, 1964) conclut, pour les ramifications tissulaires, à la présence d’un facteur tissulaire qui agirait au niveau des extrémités trachéennes et dont le stimulus résultant se propagerait le long des trachées selon une polarité. Par contre les troncs longitudinaux auraient leur croissance contrôlée par les régions nodales principales. D’autre part un contact avec les tissus serait nécessaire aux cellules trachéennes pour se différencier en trachéoles.
Ces résultats principaux concernent pour la plupart un hétérométabole, l’Hétéroptère Rhodnius, c’est pourquoi j’ai abordé l’étude expérimentale de la morphogenèse trachéenne chez les Diptères brachycères calliphoridés après en avoir étudié le développement normal (Pihan, 1968).
Cinq séries expérimentale ont été réalisées sur la pupe jeune :
Série I. Implantation d’organes larvaires vivants.
Série II. Implantation d’organes morts et de corps étrangers.
Série III. Ablation des organes génitaux.
Série IV. Ablation des îlots de trachéoblastes.
Série V. Irradiation des îlots de trachéoblastes.
I. MATERIEL ET METHODES GENERALES
Les Calliphoridés choisis sont Lucilia caesar L. et Calliphora erythrocephala Meig. Les adultes vivent dans une cage aérée où ils trouvent une nourriture liquide faite d’eau sucrée additionnée de miel et de la viande hachée humidifiée renouvelée tous les deux jours, sur laquelle les femelles viennent pondre.
L’évolution larvaire se poursuit en dehors de la cage dans un récipient garni de sciure. De la viande fraîche est fournie pendant les six premiers jours de la vie larvaire. Lorsque les larves de troisième stade ne prennent plus de nourriture elles quittent la viande et se déplacent dans la sciure. Le tamisage de celle-ci fournit les larves en voie d’empupement.
Pour les opérations, les larves et les pupes ont été désinfectées extérieurement par une immersion pendant 3 min dans une solution aqueuse d’hypochlorite à 3 % suivie d’un lavage à l’eau distillée stérile. Les interventions sont réalisées en salle stérilisée aux u.v. avec matériel stérile et dissection dans le liquide de Ringer stérile additionné de pénicilline.
II. IMPLANTATIONS D’ORGANES LARVAIRES DANS DES PUPES JEUNES DE LUCILIA CAESAR L
Série expérimentale I
A. Technique
Le donneur est prélevé au dernier stade larvaire au moment où son jabot est vide.
L’organe à implanter (gonade, disque imaginai de patte ou d’aile) est isolé par dissection et prélevé dans une micropipette de verre à étranglement, reliée à un dispositif d’aspiration constitué par une poire ‘micropompe’ à vis ‘Prolabo’.
Le receveur est une pupe de moins de 12 h. Elle est placée sur un flanc dans une logette faite en pâte à modeler. Une micropiqûre réalisée avec une épingle entomologique facilite la pénétration de la micropipette. L’organe est alors injecté dans la cavité et on vérifie qu’il ne sort pas après retrait de la pipette. La blessure peut être fermée à la paraffine chaude. Quelques cristaux de phényl-thiourée empêchent l’oxydation de l’hémolymphe qui a pu exuder. Les observations sont faites 8-10 jours plus tard, après la sortie de l’imago. L’évolution des organes implantés ainsi que leur trachéation peuvent alors être observés et faire l’objet de colorations in toto au vert de méthyl-pyronine.
B. Résultats
Avant de décrire les modifications expérimentales du système trachéen, il convient de rappeler brièvement les traits principaux de sa métamorphose et de préciser la répartition des trachées chez l’adulte.
(1) Le système trachéen imaginai normal de Lucilia caesar L
Lors de la méta-morphose, l’épithélium trachéen larvaire s’histolyse mais la taenidie du système trachéen nymphal reste en place et sert de guide à la croissance des traché-oblastes imaginaux qui reconstituent pour cette raison le même plan général. Le système trachéen abdominal comporte de chaque côté deux troncs trachéens longitudinaux : l’un en position latéro-dorsale (tld) et l’autre latéro-ventrale (tlv). Ces deux troncs sont réunis dans chaque segment par une commissure transverse (et) qui porte la trachée stigmatique (tst), lieu d’origine des trachéoblastes (Pihan, 1968). Au début de la vie intrapupariale, l’oxygène est amené à l’abdomen par une formation transitoire: la queue de cheval (qcv) issue des commissures transverses 3 et 4. Ce plan de base se complique par la formation de multiples ramifications vers le tégument (tg), le tube digestif (i) et les gonades (g). Toutes ces ramifications croissent sans guide vers les organes. Le Tableau 1 donne la répartition des trachées qui dépendent des unités 3 à 9 chez l’adulte de Lucilia caesar.
I1 a été convenu de dénombrer les trachées d’un organe en tenant compte de la possibilité de les sectionner à la pince fine, le plus près possible de l’organe considéré.
C’est ainsi que pour les ovaires, le réseau trachéen varie de 80 à 100 trachées et pour les testicules de 14 à 18.
La répartition trachéenne donnée pour Lucilia caesar est également valable dans l’essentiel pour Calliphora erythrocephala. Cependant, chez Calliphora, la trachée du jabot est issue de la troisième anastomose dorsale abdominale et le groupe de trachées Z5 plus développé, se ramifie sur le mésentéron et le proctodeum.
(2) Modifications du système trachéen du receveur
L’implantation réussit dans 18 % des cas; il y a 70 % de mortalité et 12 % d’insuccès dans la greffe. La mortalité élevée est due doit à l’infection - d’origine externe par la blessure ou interne par atteinte de l’intestin - soit à l’asphyxie, car la présence d’un cal cicatriciel empêche la nymphe de réaliser le percement des cornes respiratoires prothoraciques.
Les résultats obtenus se lisent dans le Tableau 2 qui donne le nombre et la provenance des trachées du greffon dans 10 cas de greffes de disque imaginai (1–10), de patte ou d’aile et 3 cas de greffes de gonade, testicule (A) ou ovaire (B-C). Pour l’expérience C, voire Fig. IB et Fig. 2F.
C. Analyse des résultats de la série expérimentale I
La lecture du Tableau 2 montre que les organes larvaires implantés dans une pupe de un jour acquièrent tous une trachéation propre, qui se met en place en même temps que le système trachéen imaginai de l’hôte. D’une part l’implant attire à lui et intercepte des trachées à destinée normalement autre, généralement intestinale, démontrant par là son pouvoir attractif. Si à la suite d’une déviation des trachées un territoire se trouve démuni, il y a compensation par les trachées symétriques.
D’autre part l’implant induit la formation de nouvelles trachées à partir de n’importe quel tronc trachéen en cours d’édification du moment que celui-ci se trouve dans sa sphère d’attraction. Le diamètre de cette sphère, dont le greffon occupe le centre, est variable selon la nature de l’organe implanté et peut, en cas de position axiale du greffon, intéresser à la fois les ébauches droites et gauches du système trachéen (cas no. 9, 10 et C).
On peut émettre l’hypothèse qu’il existe un gradient à l’intérieur de cette sphère, gradient dû à la présence d’un facteur qui diffuse à partir de l’organe. L’ovaire attire le plus de trachées, fait qui peut être lié à son activité métabolique élevée en phase de croissance et de vitellogenèse ainsi qu’à ses contractions musculaires.
Les trachées du greffon sont fonctionnelles ayant contracté avec lui des rapports anatomiques identiques à la normale dans le cas des gonades, mais différents dans le cas des appendices. En effet le système formé ne pénètre pas dans l’axe de ceux-ci et s’applique uniquement sur le sac péripodial.
Il arrive que les trachéoblastes transplantés avec le disque imaginai se développent et forment une structure trachéenne non fonctionnelle qui se termine par des trachéoles au niveau de l’hypoderme de l’hôte (dans les cas 1,4, 5, 6, 7,10 du Tableau 2). Les organes de l’hôte peuvent également présenter une trachéation anormale. C’est ainsi que la gonade mâle du cas 3 reçoit ses trachées par l’intermédiaire des trachées tégumentaires issues du stigmate 5. Du côté du greffon certaines trachées intestinales (i2 et i3 dans le cas 4; i6 dans le cas 9) ne sont pas formées et la spirale du mésentéron, déjetée du côté opposé à la greffe, reçoit ses trachées uniquement de ce côté. La même anomalie se trouve au niveau des glandes anales qui reçoivent toutes leurs trachées du côté opposé à la greffe (cas no. 5, 8 et 9). La zone cicatricielle du tégument reçoit toujours un important réseau trachéen issu du système tégumentaire normal.
En ce qui concerne le développement des ébauches greffées, il est conforme à leur détermination. Cependant les pattes et ailes restent incluses dans le sac péripodial et invaginées.
Les gonades greffées se développent conformément à leur sexe génétique et acquièrent leur taille normale.
Dans le cas B, l’ovaire greffé est fusionné par sa tunique à celle du testicule et dans le cas C avec l’oviducte droit du receveur. Dans le cas A, l’ovaire de l’hôte du côté du greffon ne reçoit plus de trachées du tlv 3 – 4.
Si lors de la greffe la taenidie larvaire est sectionnée, il s’en suit des malformations attestant le rôle directeur joué par celle-ci lors de la reconstitution des troncs principaux.
En résumé, un organe greffé attire à lui des trachées déjà existantes ou induit la formation de nouvelles trachées.
III. IMPLANTATION D’ORGANES MORTS CHEZ LUCILIA CAESAR OU DE CORPS ÉTRANGERS CHEZ CALLIPHORA ERYTHROCEPHALA
La liaison: facteur attractif-activité physiologique des organes, ayant été observée, il convenait de connaître la réaction des trachéoblastes en présence d’un organe mort ou de corps étrangers. Ceci a fait l’objet de la série expérimen-tale II
A. Technique
L’organe à implanter est tué par immersion dans l’alcool absolu, lavé plusieurs fois à l’eau distillée stérile et implanté dans une pupe jeune.
Une coloration préliminaire par le bleu de toluidine permet de mieux localiser l’implant après dissection de l’adulte obtenu.
De même, des fragments de filtre millipore, stériles ou non, peuvent être implantés directement dans une pupe jeune à travers une boutonnière qui est obturée ensuite à la paraffine. Ce corps étranger peut être étudié sur coupes histologiques après fixation de l’adulte.
B. Résultats de la série expérimentale II
Des observations faites chez les adultes, il résulte que :
Un organe tué n’attire pas à lui un système trachéen, ce qui est une nouvelle manifestation de la liaison du facteur attractif avec le métabolisme.
Un fragment de filtre Millipore stérile ou non, ne donne jamais lieu à une trachéation (Fig. 1F et Fig. 2 G). Par contre il est englobé dans un épithélium formé par des cellules sanguines. Celles-ci peuvent s’infiltrer à l’intérieur à la faveur d’une cassure. Cet épithélium est rarement stratifié et seulement par endroit. Je n’y ai pas observé de sécrétion de couche cuticulaire isolante autour du fragment de millipore.
(A) Schéma du système trachéen normal des Calliphoridés en vue dorsale. Côté gauche chez la femelle avec indication schématique des trachées de l’ovaire et de l’intestin. Côté droit chez le mâle, avec indication des trachées du testicule, numérotation des stigmates abdominaux 1 à 7, tracé des réseaux tégumentaires en 3 et 4. Pour la numérotation des trachées intestinales, voir les schémas C et D du côté gauche. et, commissure transverse; J, jabot; td, tube digestif; tg, trachées tégumentaires; tld, tronc trachéen latéro-dorsal; tlv, tronc trachéen latéro-ventral.
(B) Schéma des modifications du système trachéen après implantation d’une gonade supplémentaire (g), avec indication du nombre et de la provenance des trachées du greffon. Ce schéma correspond à l’expérience C du Tableau 2.
(C) Schéma des modifications du système trachéen après ablation de la gonade femelle (point noir) avec numérotation des trachées intestinales normales,j, il à i5 et 19 à Z10. Ce schéma illustre le Tableau 2.
(D) Schéma des compensations du système trachéen après ablation des trachéo-blastes de la 7e unité (flèche), avec indication du nombre des trachées de l’ovaire et du côté gauche, indication des trachées intestinales normales i6, i7 et i8. Ce schéma illustre le 4e cas du Tableau 4.
(E) Schéma des compensations du système trachéen après irradiations aux rayons X. Le côté gauche illustre le cas 7 du Table 6. Le côté droit le cas 16 du même Table. Dans chaque cas l’effectif des trachées est indiqué.
(F) Schéma de la réaction du système trachéen à l’implantation d’un fragment de millipore (m), avec indication de la capsule constituée par les hémocytes (h).
(A) Schéma du système trachéen normal des Calliphoridés en vue dorsale. Côté gauche chez la femelle avec indication schématique des trachées de l’ovaire et de l’intestin. Côté droit chez le mâle, avec indication des trachées du testicule, numérotation des stigmates abdominaux 1 à 7, tracé des réseaux tégumentaires en 3 et 4. Pour la numérotation des trachées intestinales, voir les schémas C et D du côté gauche. et, commissure transverse; J, jabot; td, tube digestif; tg, trachées tégumentaires; tld, tronc trachéen latéro-dorsal; tlv, tronc trachéen latéro-ventral.
(B) Schéma des modifications du système trachéen après implantation d’une gonade supplémentaire (g), avec indication du nombre et de la provenance des trachées du greffon. Ce schéma correspond à l’expérience C du Tableau 2.
(C) Schéma des modifications du système trachéen après ablation de la gonade femelle (point noir) avec numérotation des trachées intestinales normales,j, il à i5 et 19 à Z10. Ce schéma illustre le Tableau 2.
(D) Schéma des compensations du système trachéen après ablation des trachéo-blastes de la 7e unité (flèche), avec indication du nombre des trachées de l’ovaire et du côté gauche, indication des trachées intestinales normales i6, i7 et i8. Ce schéma illustre le 4e cas du Tableau 4.
(E) Schéma des compensations du système trachéen après irradiations aux rayons X. Le côté gauche illustre le cas 7 du Table 6. Le côté droit le cas 16 du même Table. Dans chaque cas l’effectif des trachées est indiqué.
(F) Schéma de la réaction du système trachéen à l’implantation d’un fragment de millipore (m), avec indication de la capsule constituée par les hémocytes (h).
(A) Unités trachéennes imagínales 6 et 7 d’une Calliphora ♀ normale (4 et 5 : stigmates abdominaux 4 et 5; t.o.v., trachées de l’ovaire), (× 25.)
(B) Système trachéen imaginai des unités 6 et 7 après ablation de l’ovaire chez la nymphe cryptocéphale (même légende que A). Remarquez l’absence des trachées ovariennes. (× 25.)
(C) Système trachéen imaginai des unités 6, 8 et 9 après ablation du cône de trachéo-blastes de l’unité 7 correspondant au 5e stigmate abdominal (4, 6, 7: stigmates abdominaux 4, 6, 7; flèche: localisation de l’unité 7 supprimée). Remarquez la suppléance ovarienne (t.o.v.) formée par la 6e unité, (× 25.)
(D) Ilôt de trachéoblastes (flèche) de la 7e unité ayant fait l’objet de l’ablation dont le résultat est visible en C. (× 25.)
(E) Système trachéen imaginai des unités 6, 8 et 9 après ablation du cône de trachéo-blastes de l’unité 7 (même légende que pour C). Remarquez les suppléances ovariennes formées par les unités 6 et 8 ainsi que la persistance de cellules larvaires (l) au niveau de la 7e unité. (× 25.)
(F) Trachéation d’un ovaire normal (n) et d’un ovaire greffé (g). Illustration de l’expérience C du Tableau 2. (× 25.)
(G) Détail de l’accumulation des hémocytes (h) au contact d’un greffon de Millipore (m). (× 400.)
(A) Unités trachéennes imagínales 6 et 7 d’une Calliphora ♀ normale (4 et 5 : stigmates abdominaux 4 et 5; t.o.v., trachées de l’ovaire), (× 25.)
(B) Système trachéen imaginai des unités 6 et 7 après ablation de l’ovaire chez la nymphe cryptocéphale (même légende que A). Remarquez l’absence des trachées ovariennes. (× 25.)
(C) Système trachéen imaginai des unités 6, 8 et 9 après ablation du cône de trachéo-blastes de l’unité 7 correspondant au 5e stigmate abdominal (4, 6, 7: stigmates abdominaux 4, 6, 7; flèche: localisation de l’unité 7 supprimée). Remarquez la suppléance ovarienne (t.o.v.) formée par la 6e unité, (× 25.)
(D) Ilôt de trachéoblastes (flèche) de la 7e unité ayant fait l’objet de l’ablation dont le résultat est visible en C. (× 25.)
(E) Système trachéen imaginai des unités 6, 8 et 9 après ablation du cône de trachéo-blastes de l’unité 7 (même légende que pour C). Remarquez les suppléances ovariennes formées par les unités 6 et 8 ainsi que la persistance de cellules larvaires (l) au niveau de la 7e unité. (× 25.)
(F) Trachéation d’un ovaire normal (n) et d’un ovaire greffé (g). Illustration de l’expérience C du Tableau 2. (× 25.)
(G) Détail de l’accumulation des hémocytes (h) au contact d’un greffon de Millipore (m). (× 400.)
Parfois il y a une réaction de mélanisation localisée. Il n’y a pas eu intervention de cellules trachéennes dans l’encapsulement du corps étranger contrairement aux expériences de Matz (1966) chez le Criquet. Cependant, il n’y a peut-être pas contradiction, car chez le Criquet les trachées ont pu être attirées non pas par un facteur issu du greffon inerte mais par un facteur issu de la capsule constituée par les cellules sanguines.
IV. ABLATION DES GONADES CHEZ CALLIPHORA ERYTHROCEPHALA
Série expérimentale III
Les conclusions du précédent chapitre ayant été formulées dans le cas des greffons, il était intéressant de voir comment se comportent les bourgeons de trachéoblastes non plus devant une sollicitation supplémentaire mais devant une absence de sollicitation.
L’ablation d’organes permet de réaliser cet état. L’ovaire et le testicule ont été choisis en fonction de la possibilité opératoire et, en ce qui concerne l’ovaire, pour le nombre élevé de trachées qu’il reçoit normalement (80 à 100).
A. Technique
L’examen morphologique de la pupe ne permettant pas de distinguer son sexe, les ablations intéressent les deux sexes au hasard.
Les pupes de moins de 12 h sont couchées sur le côté. Une fente est pratiquée latéroventralement au niveau du segment 8 qui correspond au segment abdominal 5. A ce niveau se trouve la commissure transverse de l’unité trachéenne 7 qui donne une ramification à l’ébauche gonadique. Une pression simultanée sur les deux lèvres de la fente provoque une extrusion de tissu adipeux dans lequel est incluse la gonade. Ce tissu est prélevé sans toucher à la commissure transverse afin de ne pas léser les trachéoblastes dont on veut étudier la croissance en l’absence de gonade. Le résultat est observé chez l’adulte après dissection. Seuls seront considérés les cas où l’ablation de l’ovaire n’a pas affecté la taenidie larvaire. Les observations concernent les unités 5, 6 et 7 dépendant des stigmates abdominaux 3, 4 et 5, car la gonade se trouve normalement entre le quatrième et le cinquième stigmate.
B. Analyse des résultats de la série expérimentale III
Chez les opérés le plan de base est conservé en ce qui concerne les troncs longitudinaux et les commissures transverses, mais de grosses modifications intéressent les ramifications de ces trachées principales.
Le Tableau 3 et les illustrations (Fig. 1 C; Fig. 2B, C) montrent que dans le cas d’une ablation de gonade femelle seules les trachées normalement afférentes à cet organe sont absentes à l’exclusion de toute autre modification. Il en va de même après ablation du testicule. Les trachées intestinales ne sont pas devenues plus nombreuses et leur origine est restée identique à la normale.
Série expérimentale III: Modifications du système trachéen après ablation de la gonade femelle chez Calliphora erythrocephala

De ces constatations, il résulte que :
Le plan de base s’établit dans son intégrité dès lors que la taenidie larvaire n’est pas sectionnée et ceci indépendamment de la présence des organes.
À partir de ce plan de base et au cours de la vie nymphale, diverses sollicitations, venant des organes, déterminent la croissance de trachées vers ceux-ci. En l’absence des organes ces trachées n’existent pas. Les trachées viscérales ne sont donc pas déterminées au niveau des bourgeons de trachéoblastes mais ces bourgeons ont la possibilité de répondre à des impulsions venant des organes.
Puisque au niveau du système trachéen on ne trouve aucune trace des trachées allant normalement à l’organe extirpé, c’est que l’action à distance exercée par l’organe sur les trachéoblastes a lieu normalement alors que ceux-ci ne forment encore qu’un simple manchon au niveau de la commissure transverse et des troncs longitudinaux ventraux.
L’attraction exercée sur cet épithélium trachéen indifférencié détermine une multiplication des trachéoblastes par mitoses, puis une croissance vers l’organe solliciteur suivie de différenciation en trachées et trachéoles.
Puisque le nombre des trachées intestinales ne varie pas, on peut en conclure que les exigences des organes sont quantitativement fixées et que le facteur présent agit qualitativement et quantitativement.
Si l’on considère l’état final de la morphogenèse trachéenne, il apparaît que si l’adulte présente toujours le même plan de trachéation, ceci n’est pas dû à sa prédétermination mais au fait que les organes sont en position fixe et que par conséquent leur sphère d’attraction englobe toujours les mêmes îlots de trachéo-blastes. Les seules structures prédéterminées sont les stigmates, en nombre et position; ainsi que les trachées du plan de base, à savoir les troncs trachéens longitudinaux et les commissures transverses.
V. ABLATION CHIRURGICALE OU DESTRUCTION PAR IRRADIATION DES TRACHÉOBLASTES CHEZ LUCILIA CAESAR
Les séries expérimentales I et III ont modifié le seul facteur ‘organe’ du rapport trachées-organes. Les présentes séries IV et V ont pour but de modifier le facteur ‘trachée’ respectivement par l’ablation (série IV) et la destruction par irradiation (série V) des îlots de trachéoblastes abdominaux.
A. Techniques
Dans la série IV, l’ablation est réalisée sur les larves du dernier stade à jabot vide, anesthésiées à l’éther sulfurique pendant 40 minutes. Une fente est pratiquée latéralement et, à l’aide d’une minutie stérile recourbée, la commissure transverse est tirée vers l’extérieur. La boucle ainsi formée est réséquée, ce qui détermine l’ablation de l’îlot de trachéoblastes. Quelques cristaux de pénicilline G sont déposés sur l’incision. Une vérification histologique est effectuée sur le fragment prélevé par coloration à l’orcéine acétique (Fig. 2D). Les unités 6 à 8 ont été choisies pour leur appartenance à la région génitale de l’abdomen, la plus facile à observer après dissection chez l’adulte.
Dans la série V, les rayons X permettent la destruction spécifique d’un îlot de trachéoblastes sans lésion ouverte du tégument. Le tube à rayons X est utilisé sans filtre sous une tension de 50 kV avec une intensité de 10 mA. A 15 cm de l’anticathode en molybdène le débit est d’environ 2600 r/mn. Des essais préliminaires ont permis de fixer à 78000 r, soit 30 mn d’irradiation, la dose nécessaire à une destruction totale. La destruction sélective des îlots abdominaux a été obtenue en plaçant la pupe sur la face ventrale et en limitant l’irradiation grâce à un cache de plomb échancré au-dessus de la région à irradier.
Les résultats des ablations et des irradiations sont observés chez l’adulte après dissection.
B. Ablations chez Lucilia caesar (série expérimentale IV)
Le Tableau 4 donne d’une part l’inventaire des trachées manquantes en fonction de l’unité touchée et d’autre part les compensations réalisées pour la gonade et l’intestin.
Série expérimentale IV: suppressions et compensations trachéennes résultant de l’ablation d’îlots de trachéoblastes

Les conclusions seront envisagées après l’étude des destructions par irradia-tion.
Dans tous les cas, des ramifications issues des trachées tégumentaires des unités avoisinantes se dirigent vers la zone de cicatrisation. De nouvelles trachées tégumentaires peuvent également avoir pour point d’origine la commis-sure transverse ou les troncs trachéens longitudinaux.
Il peut y avoir des anomalies, par dilatation du tronc longitudinal dorsal à la suite de la non-exuviation de la taenidie larvaire et conservation de cellules larvaires (Fig. 2E).
C. Irradiations aux rayons X chez Lucilia caesar (série expérimentale V)
Il convient de distinguer le stade ‘Nymphe à tête invaginée’ dit Cryptocéphale du stade ‘Nymphe à tête formée’, dit stade Phanérocéphale, non pas du point de vue des conséquences, mais du point de vue de la localisation de l’irradiation qui tout en concernant le même segment du puparium atteint en fait des territoires différents, compte-tenu des mouvements intrapupariaux entre le stade cryptocéphale et le stade phanérocéphale.
La Fig. 3 permet la localisation des îlots de trachéoblastes en fonction de l’âge de la pupe.
Localisation des îlots de trachéoblastes des unités trachéennes l à 9 (chiffres 1 à 9 surimposés au dessin) en fonction de la segmentation externe du puparium numérotée de .1 à 11 dans la colonne de droite. La partie gauche du schéma représente le stade ‘cryptocéphale’, la droite le stade ‘phanérocéphale’. Exemple: pour détruire la 7e unité trachéenne, il convient d’irradier la partie antérieure du 8e segment au stade ‘cryptocéphale’, mais celle du 10e segment au stade ‘phanérocéphale’.
Localisation des îlots de trachéoblastes des unités trachéennes l à 9 (chiffres 1 à 9 surimposés au dessin) en fonction de la segmentation externe du puparium numérotée de .1 à 11 dans la colonne de droite. La partie gauche du schéma représente le stade ‘cryptocéphale’, la droite le stade ‘phanérocéphale’. Exemple: pour détruire la 7e unité trachéenne, il convient d’irradier la partie antérieure du 8e segment au stade ‘cryptocéphale’, mais celle du 10e segment au stade ‘phanérocéphale’.
L’irradiation des unités 1 et 2 entraîne des malformations des pattes et des ailes. Seules les irradiations intervenant sur les unités 4 à 9 et qui ne lèsent pas les organes, ont été retenues en vue de l’étude des trachées. Si les disques imaginaux de l’hypoderme sont touchés, un demi-tergite peut manquer chez l’adulte et l’abdomen présente alors une courbure anormale du côté irradié, ceci conformément aux études histologiques de Bautz (1971).
Une irradiation trop tangentielle supprime le stigmate par destruction de Pilot imaginai stigmatique qui est noyé dans l’hypoderme et puisque le cône de trachéoblastes n’a pas été atteint, le système trachéen se forme avec une branche stigmatique aveugle et parfois un bouquet de trachéoles se rendant à l’hypoderme.
Le Tableau 5 résume les observations concernant les 16 cas de la quatrième série expérimentale. Les cas 6 et 13 sont schématisés Fig. 1E.
D. Analyse des résultats des séries expérimentales IV et V
Dans tous les cas la région tégumentaire touchée reçoit à partir des unités avoisinantes une suppléance sous formes de trachées tégumentaires.
L’ablation ou la destruction des trachéoblastes aurait dû provoquer à priori une déficience trachéenne au niveau des organes normalement concernés. La lecture des Tableau 4 et 5 montre en fait que cette déficience est compensée par un apport trachéen d’origine variée.
Au niveau du tube digestif, organe axial avec deux zones plus denses dues à des circonvolutions, l’expérimentation unilatérale détruit l’équilibre qui normalement s’établit par la croissance des formations trachéennes symétriques. Il y a compensation, d’une part grâce aux trachées intestinales contralatérales qui s’étendent sur un plus grand territoire et déplacent même par traction le tube digestif vers le côté sain (cas 4, 11, 15 du Tableau 5) et d’autre part grâce aux trachées intestinales ayant pour origine les unités trachéennes antérieures ou postérieures à l’unité supprimée et du même côté (cas 2, 3,4, 5, 6, 7 du Tableau 4 et cas 5, 6, 10, 15 du Tableau 5). Quant aux papilles anales, elles reçoivent normalement leur trachéation de ci6 et ci 7, or si et6 est atteint, toutes les trachées viendront de ctl et vice-versa (cas 6 et 9 du Tableau 5).
En ce qui concerne les gonades, organes pairs, les compensations viennent toujours du côté correspondant (cas 1, 6 du Tableau 4 et cas 5, 6, 8, 9, 12, 13, 14, 15 du Tableau 5), sauf dans un cas où une seule trachée provient de l’autre côté.
Les compensations réalisent une trachéation fonctionnelle moindre, égale ou même supérieure à la normale (cas 5, 6 du Tableau 4 et cas 6 du Tableau 5). Ce fait est surtout net au niveau des ovaires qui ont une activité métabolique plus élevée que les testicules.
Les compensations génitales sont réalisées soit par:
Détournement de trachées à fonction primitivement autre, par exemple des trachées tégumentaires (<g5, cas 5 du Tableau 5) ou intestinales
soit par
Augmentation du nombre des trachées génitales issues conformément à la normale des trachées transverses, stigmatiques ou longitudinales dorsales ou ventrales.
La première donnée qui ressort des deux séries expérimentales IV et V, c’est qu’un organe normal situé à son emplacement normal, attire des trachées à partir d’une source anormale, éloignée, si la source normale a été supprimée.
Ce fait confirme l’hypothèse énoncée précédemment d’un facteur tissulaire émanant de chaque organe et agissant sur les trachéoblastes.
Les trachées nouvelles trouvent l’organe en l’absence de structure guide. C’est donc que le facteur lui-même possède un effet directionnel et qu’il est réparti suivant un gradient de diffusion. Si expérimentalement des îlots de trachéoblastes très éloignés sont sollicités, c’est que le facteur attractif est arrivé à leur niveau en quantité susceptible de déterminer une réponse. Si dans les conditions normales les mêmes îlots ne sont pas activés, c’est que le facteur attractif n’a pas diffusé jusqu’à eux ou bien qu’il est présent soit à un taux inférieur au seuil limite de réponse, soit sous une forme inactive.
Selon toute vraisemblance, les trachéoblastes en croissance absorbent ou inhibent le facteur qui les stimule.
L’observation anatomique des positions relatives des organes et des îlots de trachéoblastes par rapport à la seule source d’oxygène représentée par la formation dite en ‘queue de cheval’ et qui chemine à travers le tissu adipeux en empruntant le tunnel tracé par les anciennes structures larvaires, longitudinales, montre que l’apport en oxygène doit être plus important au niveau des trachéoblastes qu’à celui des organes.
On peut donc émettre l’hypothèse d’un métabolisme différent des trachéo-blastes et des organes. Les organes possèdent au cours des premiers jours de la vie intrapupariale un métabolisme anaérobie pouvant donner lieu à la libération d’un produit intermédiaire ou final de la glycolyse des hydrates de carbone selon la séquence d’Embden Meyerhof avec accumulation de pyruvate et glycéro-phosphate, plus rarement de lactate (Gilmour, 1961). Ces produits pourraient être considérés comme étant le facteur attractif et les trachéoblastes réaliseraient sa dégradation aérobie par oxydation selon le cycle de Krebs. Cette oxydation serait susceptible de fournir l’énergie nécessaire à leur croissance. Le facteur attractif serait dans cette optique également facteur énergétique de croissance. La sphère d’attraction étant assez large autour de chaque organe, il faut d’autre part que la substance active diffuse facilement.
Il y a tout lieu de penser que tous les organes émettent un même facteur capable d’agir sur des trachéoblastes de diverses origines mais que certains organes comme l’ovaire en émettent plus que d’autres et attirent pour cette raison davantage de trachées. Il faut noter à ce sujet que si l’ovaire a été atteint par l’irradiation, il reçoit un nombre réduit de trachées. De toute évidence, son activité physiologique a été réduite et il a sécrété une moindre quantité de substance active.
CONCLUSION ET DISCUSSION
La morphogenèse du système trachéen imaginai est sous la dépendance de nombreux facteurs intervenant selon une chronologie définie.
Les schémas de Fig. 4 illustrent l’intervention de ces facteurs au cours de la vie intra-pupariale.
(A) Schéma de l’état hormonal et trachéen au moment de la formation du puparium. L’anneau de Weismann (w) est représenté sans ses connections avec le cerveau au niveau du Corpora cardiaca (cc.). L’hormone juvénile (hj) produite par le corpora allata (ca) a disparu depuis la fin de la période alimentaire. L’ecdysone (ec) produite par la glande péritrachéenne (gm) a fortement augmenté. L’épithélium trachéen larvaire (tl) va s’histolyser. Les trachéoblastes (t) vont se multiplier. L’ovaire commence sa croissance (ov). Le tube digestif prépare sa métamorphose (td).
(B) Schéma d’une pupe de 3 jours. La mue nymphale intra-pupariale a eu lieu. Ce stade est celui de la nymphe cryptocéphale. La taenidie trachéenne nymphale (tn) sert de guide à la croissance des trachéoblastes. Des bourgeons de trachéoblastes (b) se forment au niveau des commissures transverses sous l’action stimulatrice et attractive d’un organe axial, le tube digestif, et des organes bilatéraux, que constituent les ovaires et les glandes anales (ga). La flèche large représente la diffusion du facteur tissulaire(ft); l’autre, la direction décroissance des trachéoblastes en présence de ce facteur.
(C) Schéma d’une pupe de 6 jours. Ce stade est celui de la nymphe phanérocéphale. Les bourgeons de trachéoblastes atteignent les organes. Les sphères d’attraction se rétrécissent en même temps que les trachéoblastes progressent.
(D) Schéma d’une pupe de 9 jours. Ce stade est atteint 1 jour avant la mue imagínale, qui est en préparation. L’ecdysone ainsi que l’hormone juvénile ont disparu. La production de néoténine ne reprendra que plusieurs heures après l’émergence de l’imago. Les organes n’exercent plus de pouvoir attractif sur les trachéoblastes qui se sont différenciés en trachées et trachéoles.
Nota. La taenidie trachéenne nymphale, représentée en tirets sur les Figs. B et C, n’est pas représentée en D afin de ne pas surcharger le tracé.
(A) Schéma de l’état hormonal et trachéen au moment de la formation du puparium. L’anneau de Weismann (w) est représenté sans ses connections avec le cerveau au niveau du Corpora cardiaca (cc.). L’hormone juvénile (hj) produite par le corpora allata (ca) a disparu depuis la fin de la période alimentaire. L’ecdysone (ec) produite par la glande péritrachéenne (gm) a fortement augmenté. L’épithélium trachéen larvaire (tl) va s’histolyser. Les trachéoblastes (t) vont se multiplier. L’ovaire commence sa croissance (ov). Le tube digestif prépare sa métamorphose (td).
(B) Schéma d’une pupe de 3 jours. La mue nymphale intra-pupariale a eu lieu. Ce stade est celui de la nymphe cryptocéphale. La taenidie trachéenne nymphale (tn) sert de guide à la croissance des trachéoblastes. Des bourgeons de trachéoblastes (b) se forment au niveau des commissures transverses sous l’action stimulatrice et attractive d’un organe axial, le tube digestif, et des organes bilatéraux, que constituent les ovaires et les glandes anales (ga). La flèche large représente la diffusion du facteur tissulaire(ft); l’autre, la direction décroissance des trachéoblastes en présence de ce facteur.
(C) Schéma d’une pupe de 6 jours. Ce stade est celui de la nymphe phanérocéphale. Les bourgeons de trachéoblastes atteignent les organes. Les sphères d’attraction se rétrécissent en même temps que les trachéoblastes progressent.
(D) Schéma d’une pupe de 9 jours. Ce stade est atteint 1 jour avant la mue imagínale, qui est en préparation. L’ecdysone ainsi que l’hormone juvénile ont disparu. La production de néoténine ne reprendra que plusieurs heures après l’émergence de l’imago. Les organes n’exercent plus de pouvoir attractif sur les trachéoblastes qui se sont différenciés en trachées et trachéoles.
Nota. La taenidie trachéenne nymphale, représentée en tirets sur les Figs. B et C, n’est pas représentée en D afin de ne pas surcharger le tracé.
Une étude actuellement en cours met en évidence que le développement des trachéoblastes est tout d’abord lié aux facteurs hormonaux et humoraux, spécifiques de l’état nymphal, facteurs qui ont été étudiés par Shaaya & Karlson (1965), et Shaaya & Levinson (1966).
L’état hormonal nymphal permet la multiplication des trachéoblastes qui, par leur progression le long du guide formé par la taenidie larvaire non exuviée, construisent le plan de base du système trachéen, plan déterminé au cours de la vie embryonnaire.
Les facteurs tissulaires apparaissent plus tard et interviennent en provoquant, au niveau de l’épithélium trachéen des trachées principales, la formation de ramifications viscérales ou tégumentaires, ramifications qui ne sont pas pré-déterminées. Il faut admettre un épuisement du facteur tissulaire à une certaine distance de l’organe, épuisement lié à la croissance des trachéoblastes vers l’organe solliciteur.
Etant donné que les différents organes sont en position fixe, il en résulte pour les trachées une fausse apparence de stabilité; stabilité qui ne se vérifie pas lors de l’analyse expérimentale. Les phénomènes de compensation prouvent que n’importe quelle cellule de l’épithélium trachéen est susceptible de fournir des trachées fonctionnelles supplémentaires du moment que le facteur tissulaire est présent.
Ces conclusions peuvent être comparées à celles formulées par Locke (1958 b) pour l’hétéroptère Rhodnius prolixus en tenant compte des modalités différentes de la métamorphose de son système trachéen, à savoir la persistance de l’épithélium trachéen larvaire avec simplement élargissement des troncs trachéens et addition de nouvelles petites trachées et trachéoles.
Dans le cas précis où chez Rhodnius une section de trachée viscérale à une certaine distance de l’organe est suivie de la seule dilatation de la portion attachée à celui-ci, Locke conclut d’une part à l’existence d’un facteur tissulaire produisant au niveau de l’extrémité trachéenne un stimulus causant l’augmentation de diamètre et d’autre part à la propagation de ce stimulus le long de la trachée selon une polarité qui lui est intrinsèque. La section interrompt cette propagation et la portion trachéenne comprise entre le tronc longitudinal et la section ne s’accroît pas.
Chez les Calliphoridés, la présence d’un facteur tissulaire a été démontrée. Cependant étant donné que les trachées en croissance n’ont aucun contact avec l’organe, il faut admettre que ce facteur agit à distance et qu’il se répartit autour de l’organe producteur selon un gradient de concentration.
On peut admettre que le phénomène de polarité est en fait lié à ce gradient. Dans le cas de Rhodnius si la partie proximale de la traché viscérale sectionnée ne s’accroît pas, c’est parce que sa portion distale englobée dans la sphère d’attraction utilise ou inhibe le facteur attractif.
Toujours selon Locke (1958 b), les troncs longitudinaux latéraux échapperaient au contrôle par facteurs tissulaires et auraient leur croissance contrôlée par les régions nodales. Des sections de chaque côté des noeuds ont montré qu’il y a élargissement seulement de la portion de trachée possédant le noeud.
En ce qui concerne les Calliphoridés, ceci ne s’est pas confirmé. En effet, lors de la métamorphose, les régions nodales sont histolysées et, la régénération commençant à partir de la branche stigmatique, les noeuds sont en fait les dernières structures à se former à la rencontre de deux unités. Cette modalité de la croissance ne fait d’ailleurs que répéter le processus de l’embryogenèse du système trachéen.
L’histologie des régions nodales (Pihan, 1967) n’apporte aucun argument en faveur d’une action active des noeuds sur la croissance trachéenne. Par contre, elle permet de leur attribuer une fonction essentielle dans l’union de deux unités successives. On peut admettre également qu’avant d’avoir un rôle dans l’union, les cellules qui seront plus tard les cellules nodales dirigent la croissance des bourgeons trachéens au cours de l’embryogenèse selon un plan déterminé.
En ce qui concerne la nature chimique du facteur tissulaire, plusieurs travaux déjà signalés en introduction peuvent orienter les recherches vers les échanges gazeux de la respiration. L’hypothèse de travail étant alors que les trachées progressent vers les régions riches en gaz carbonique ou déficientes en oxygène. Dans cette optique, et selon les observations de Wigglesworth (1959, 1961), il convient de tenir compte également des possibilités qu’ont les cellules solliciteuses de trachéoles de se diriger vers celles-ci et de les détourner.
Une autre hypothèse de travail peut tenir compte des produits organiques résultant du métabolisme des organes en phase anaérobie ou aérobie.
Il convient de noter que l’étude du métabolisme respiratoire apporte des arguments qui concordent avec cette hypothèse. En effet, les travaux entrepris par Fourche (1969) confirment une élévation du métabolisme respiratoire des organes isolés de la pupe de Drosophila melanogaster, alors que la courbe du métabolisme respiratoire général est une courbe en U avec une phase descendante au début de la vie intra-pupariale.
Des recherches sont actuellement entreprises pour déterminer la nature exacte du facteur tissulaire.
RÉSUMÉ
Afin d’étudier les facteurs de la morphogenèse du système trachéen lors de la nymphose des diptères Calliphoridés, diverses interventions ont été pratiquées pour modifier les rapports entre organes et trachées.
Les résultats suivants ont été obtenus :
Des organes larvaires implantés attirent des branches trachéennes supplémentaires, ce qui prouve la possibilité pour le système trachéen de s’adapter à de nouvelles exigences.
L’ablation d’organes larvaires supprime toute croissance des trachées accessoires normalement affectées à ceux-ci, alors que les trachées principales ne sont pas modifiées. Il existe donc un plan de base trachéen déterminé avant la nymphose auquel se surajoutent des ramifications dont l’origine, le nombre et le calibre répondent aux sollicitations des organes.
Le facteur attractif libéré par l’organe et désigné provisoirement facteur tissulaire, est lié à l’activité métabolique de l’organe. Un organe tué, de même qu’un corps étranger inerte, n’a aucune action attractive sur les bourgeons de trachéoblastes en croissance.
L’ablation ou l’irradiation aux rayons X d’un massif de trachéoblastes entraîne l’agénésie de l’unité trachéenne correspondante. Cependant, il y a compensation au niveau des organes concernés par cette perte, par formation de nouvelles trachées ou détournement de trachées à destinée normalement autre et ce à partir des unités avoisinantes.
Dans certaines conditions expérimentales la sphère d’attraction d’un organe est donc plus large et on peut émettre l’hypothèse que le facteur tissulaire est une substance chimique produit par le métabolisme cellulaire dans les conditions d’anérobiose partielle qui sont celles réalisées chez la nymphe des Diptères Calliphoridés. Ce facteur est soit inactivé, soit méta-bolisé par les trachéoblastes en croissance.
Il n’y a pas besoin de contact tissulaire entre les organes et l’épithélium trachéen pour induire la formation des trachées et trachéoles. L’attraction se fait à distance.
Les régions nodales ne jouent aucun rôle dans la coordination de la croissance trachéenne chez les Calliphoridés, car pendant la métamorphose ces régions sont histolysées.
Ce mémoire constitue une partie de la thèse qui sera présentée par l’auteur devant la Faculté des Sciences en vue de l’obtention du grade de Docteur ès Sciences.