ABSTRACT
Un certain nombre de travaux ont déjà montré l’existence, dans le cours du développement embryonnaire et postembryonnaire de la Poule, de plusieurs hémoglobines se succédant dans le temps. Cependant une difficulté considérable provient du désaccord entre les auteurs au sujet des résultats que donne le fractionnement des hémolysats. Chez la poule adulte, le nombre des fractions obtenues va de deux à cinq selon les auteurs. Les hémoglobines de l’adulte servant de référence dans l’étude des hémoglobines de l’embryon et du poussin, l’insécurité de leur définition rend aléatoire toute conclusion concernant les changements qui peuvent intervenir sur ce point au cours du développement. Il nous a donc paru nécessaire de soumettre au recoupement d’un ensemble de techniques les fractions d’hémoglobine que l’on peut obtenir à partir d’un hémolysat de poule et de poussin. L’ensemble de ces techniques nous a conduit à admettre l’existence de quatre constituants dans les hémoglobines de poule adulte. Elles aboutissent également à une caractérisation d’hémoglobines propres au jeune poussin, apparemment distinctes des hémoglobines de l’embryon de 5 à 7 jours.
MATERIEL ET METHODES
Préparation des hémolysats. Les animaux utilisés appartiennent à la race Leghorn. Les adultes sont âgés d’au moins 6 mois et les poussins de 1 à 4 jours. Les érythrocytes, fraîchement collectés par décapitation, sont lavés trois fois avec une solution saline isotonique avant d’être lysés par un mélange d’eau et de toluène (1/0,2). Dans certains cas, on a incorporé à l’eau de lyse du mercapto-éthanol (concentration finale 4 mM). Toutes les opérations suivantes sont pratiquées à 4 °C. Après 1 h de contact, le lysat est centrifugé à 30000g pendant 30 min. Les chromatographies et électrophorèses successives sont ensuite enchaînées sans perte de temps, de telle façon que l’ensemble des opérations, depuis la récolte du sang, ne dure pas plus de 4 jours. La conservation plus longue des hémolysats modifie en effet leurs propriétés et provoque l’apparition de constituants artefactuels. Dans certains cas, afin de tester, parmi les causes possibles d’artefacts, celles résultant d’une transformation de l’hémoglobine en composés dotés d’états d’oxydation différents, l’hémolysat a été traité par une solution de ferricyanure-cyanure de potassium (concentration 1 mM-0,5 mM par g d’Hb) afin d’obtenir une cyanméthémoglobine; les opérations ultérieures sont alors conduites en présence de KCN (10 mg/1.).
Purification des hémolysats sur Sephadex
Une colonne de Sephadex G 75 (2x40 cm) est équilibrée avec un tampon 0,35 M-NaCl-0,01 M-Tris ajusté à pH 7,0 par N-HCI. Elle est chargée avec 150 mg de protéines et éluée à un débit horaire de 20 ml. La densité optique de l’éluat est enregistrée de façon continue à 253 m/ μ par un Uvicord LKB (fig. l).
Concentration et dialyse de la solution d’hémoglobine
Pour être passées en électrophorèse ou en chromatographie, les solutions obtenues à la sortie de la colonne de Sephadex (ou à la sortie d’une colonne de chromatographie) doivent être concentrées et dialysées contre un tampon adéquat. Pour cela, elles sont filtrées, sous aspiration par le vide, dans un sac de collodion (Membranfilterges, Gottingen), placé au contact du tampon choisi pour l’opération suivante.
Chromatographie sur celluloses échangeuses d’ions
On a utilisé d’une part les CM-et DEAE-celluloses Serva (capacités respectives de 0,7 m-equiv/g et 0,8 m-equiv/g), d’autre part les CM52 et DE52 microgranulaires Whatmann (capacité 1 m-equiv/g). Les celluloses Serva subissent, avant d’être utilisées, plusieurs lavages pratiqués selon la méthode de Peterson & Sober (1958). Elles sont ensuite équilibrées contre le tampon de départ de la chromatographie. Seule la dernière étape est nécessaire pour les celluloses Whatmann. Les colonnes de CM-celluloses (35 x 0,6 cm) reçoivent 21 mg d’hémoglobine et les colonnes de DE-celluloses (15 x0,6 cm) 15 mg. L’éluant est un tampon Tris-HCl maintenu à pH 6,9 pour les CM-celluloses et à pH 8,6 pour les DE-celluloses; il est fourni à un débit constant de 18 ml/h. On a employé selon les cas une élution par paliers de concentration ou par un gradient linéaire de concentration; les conditions exactes de l’élution seront définies plus loin.
Electrophorèsesur gel d’amidon
Elle est pratiquée selon la technique déjà décrite (Godet, 1967). Dans de nombreux cas, on a substitué au tampon acide borique 0,03 M ajusté à pH 8,6 par N-NaOH, qui exige en moyenne 3 h d’électrophorèse, un tampon Tris 0,03 M ajusté à pH 8,0 par l’acide borique cristallisé. Dans ces conditions, une bonne séparation des hémoglobines est obtenue en une heure.
Electrophorèse sur gel de polyacrylamide
Elle est conduite selon la technique décrite antérieurement (Schürch, Godet, Nigon & Blanchet, 1968). Dans quelques cas, on a employé aussi la technique de Davis (1964). Pour éluer les hémoglobines ainsi séparées, les boudins de polyacrylamide sont découpés, broyés
Toutes les molarités indiquées sont celles du Tris présent dans le tampon. Celui-ci est ajusté, par N-HCI, à pH 6,9 pour les colonnes de CM-cellulose (35 × 0,6 cm) et à pH 8,6 pour les colonnes de DE-cellulose (15 × 0,6 cm).
Elution par paliers: la concentration indiquée pour le tampon de charge correspond à celle du tampon avec lequel la colonne d’échangeurs est équilibrée. On a indiqué pour chaque palier le type d’hémoglobine éluée.
Elution par gradient: chaque colonne d’échangeurs est équilibrée avant la charge de l’hémolysat avec un tampon contenant 0,01 M de Tris. On a indiqué la succession des hémoglobines éluées par l’application d’un gradient linéaire de concentration M/100 à M/5.
dans un potter en présence de tampon Tris-acide borique (Tris 0,01 M, pH 8,0) et laissés 1 h au froid. Le surnageant est recueilli après centrifugation pendant 30 min à 30000 g.
RESULTATS
1 Les hémoglobines de F adulte
Chromatographie sur CM52Whatmann avec élution par paliers discontinus de concentration. On obtient ainsi quatre constituants distincts que nous dénommerons Ax à A4. Le tableau 1 et la figure 2 résument les résultats. L’utilisation d’hémolysats dans lesquels l’oxyhémoglobine a été transformée en cyan-méthémoglobine n’apporte aucune modification au diagramme de séparation. Nous examinerons successivement les propriétés des diverses fractions obtenues.
Modes d’élution utilisés en chromatographie sur CM-et DE-celluloses et séparations obtenues

Filtration d’un hémolysat de Poule sur Sephadex G 75. La fraction 1 renferme les protéines autres que l’hémoglobine. La fraction 2 contient la totalité de l’hémoglobine. La fraction 3 comprend des composants de faible poids moléculaire de nature non protéique.
Chromatographie sur cellulose Whatmann CM52 d’un hémolysat de Poule. Elution par paliers discontinus de concentration. L’indication de molarité correspond à la concentration en Tris, le pH étant ajusté à 6,9 par N-HC1. La première molarité est celle du tampon de charge.
Hémoglobine Ax
Cette fraction est éluée par un tampon de concentration M/43. Lorsqu’elle est passée en électrophorèse sur gel d’amidon, on obtient une bande majeure qui migre à la même vitesse que la bande la plus anodique de l’hémolysat total (fig. 3 A). Derrière cette bande majeure, on trouve constamment quelques traces des bandes suivantes (à peine visibles sur la figure 3 A). Toutes les tentatives effectuées en vue d’éliminer ces fractions contaminantes dans d’autres systèmes de chromatographie se sont soldées par l’échec. Sur gel de polyacrylamide, la fraction ainsi obtenue donne une seule bande anodique (fig. 3 B). L’hémoglobine Ax représente 2 à 5% de la quantité totale d’hémoglobine présente chez l’animal adulte.
Electrophorèse des hémoglobines de la Poule et du poussin d’un jour. (A) Electrophorèse sur gel d’amidon en présence de tampon Tris 0,03 M ajusté à pH 8,0 par l’acide borique cristallisé. (B) Electrophorèse sur gel de polyacrylamide selon notre technique (Schürch et at. 1968). (C) Electrophorèse sur gel de polyacrylamide selon la technique de Davis (1964). A = hémolysat total de Poule. P = hémolysat total de poussin d’un jour. A15 A2, A3, A3, A4 = hémoglobines de la Poule et du poussin d’un jour obtenues par chromatographie sur cellulose Whatmann CM52. F = hémoglobine du poussin d’un jour obtenue par chromatographie sur DE-cellulose Serva.
Electrophorèse des hémoglobines de la Poule et du poussin d’un jour. (A) Electrophorèse sur gel d’amidon en présence de tampon Tris 0,03 M ajusté à pH 8,0 par l’acide borique cristallisé. (B) Electrophorèse sur gel de polyacrylamide selon notre technique (Schürch et at. 1968). (C) Electrophorèse sur gel de polyacrylamide selon la technique de Davis (1964). A = hémolysat total de Poule. P = hémolysat total de poussin d’un jour. A15 A2, A3, A3, A4 = hémoglobines de la Poule et du poussin d’un jour obtenues par chromatographie sur cellulose Whatmann CM52. F = hémoglobine du poussin d’un jour obtenue par chromatographie sur DE-cellulose Serva.
Hémoglobine
Cette fraction est éluée par un tampon de concentration M/30. Elle se comporte en gel d’amidon comme la bande la plus faiblement anodique de l’hémo-lysat total et apparaît convenablement pure. Sur gel de polyacrylamide, elle migre exactement comme l’hémoglobine AP L’hémoglobine A2 comprend 20 à 23% de la quantité totale d’hémoglobine contenue dans les hémolysats d’adulte.
Hémoglobine A3
Cette fraction est éluée par un tampon de concentration M/20. Elle migre en gel d’amidon en position légèrement cathodique, au même niveau que la large bande cathodique fournie par l’hémolysat total. C’est seulement en gel de polyacrylamide qu’elle apparaît parfaitement individualisée comme la deuxième bande de l’hémolysat total, en partant de l’extrémité anodique. L’hémoglobine A3 représente moins de 1% de l’hémoglobine totale chez la poule adulte.
Hémoglobine A±
Cette fraction est éluée par un tampon de concentration M/15. En électrophorèse sur gel d’amidon, elle migre en position légèrement cathodique et se confond avec l’hémoglobine A3. Sur gel de polyacrylamide, elle se divise en trois bandes que l’on retrouve parfaitement dans les résultats fournis par l’hémolysat total. Cette division conduit à se demander s’il s’agit d’une fraction homogène. Pour répondre à cette question, les trois constituants visibles sur polyacrylamide ont été élués et repassés en électrophorèse. Dans ces conditions, chacune des bandes isolées a fourni de nouveau les trois bandes caractéristiques. Il semble donc que l’hémoglobine A4 soit un constituant homogène, susceptible d’apparaître sous trois formes distinctes liées entre elles par un système de transformations réversibles. Après conversion en cyanméthémoglobine, l’hémoglobine A4 ne fournit plus qu’une seule bande en gel de polyacrylamide; ceci nous incite à penser que ses transformations concernent l’état d’oxydation de la molécule. L’hémoglobine A4 représente 75% de la quantité totale d’hémoglobine contenue chez l’adulte.
Autres modes de séparation
Diverses autres modalités ont été employées afin de recouper les techniques des auteurs. Les résultats sont présentés dans le tableau 1 et les figures 4 et 5. Les conclusions suivantes ressortent:
Chromatographie sur cellulose Whatmann DE52 d’un hémolysat de Poule. Elution par paliers discontinus de concentration. L’indication de molarité correspond à la concentration en Tris, le pH étant ajusté à 8,6 par N-HCI. La première molarité est celle du tampon de charge.
- Les chromatographies sur DE-cellulose conduisent à la perte des fractions At et A3, même lorsque celles-ci ont fait l’objet d’un enrichissement préalable par chromatographie sur CMC. Ceci se produit aussi bien par paliers discontinus (fig. 4) que dans les élutions par gradients (fig. 5D).Fig. 5
Chromatographie sur CM-et DE-celluloses d’un hémolysat de Poule. A partir de la flèche G, élution par gradient linéaire de concentration (cf. tableau 1). (A) chromatographie sur CM-cellulose d’un hémolysat entier. (B) chromatographie sur CM-cellulose d’un hémolysat purifié au préalable sur Sephadex. (C) chromatographie sur DE-cellulose d’un hémolysat entier. (D) chromatographie sur DEcellulose d’un hémolysat purifié au préalable sur Sephadex. Les zones hachurées correspondent à des protéines non hémoglobiniques entraînant avec elles une fraction d’hémoglobine
Fig. 5Chromatographie sur CM-et DE-celluloses d’un hémolysat de Poule. A partir de la flèche G, élution par gradient linéaire de concentration (cf. tableau 1). (A) chromatographie sur CM-cellulose d’un hémolysat entier. (B) chromatographie sur CM-cellulose d’un hémolysat purifié au préalable sur Sephadex. (C) chromatographie sur DE-cellulose d’un hémolysat entier. (D) chromatographie sur DEcellulose d’un hémolysat purifié au préalable sur Sephadex. Les zones hachurées correspondent à des protéines non hémoglobiniques entraînant avec elles une fraction d’hémoglobine
Les élutions par gradient de concentration conduisent à une résolution amoindrie. En particulier, sur CMC, les fractions A3 et A4 ne sont pas séparées (fig. 5 B).
Lorsqu’on soumet à la chromatographie des hémolysats qui n’ont pas été préalablement purifiés sur Sephadex, on obtient des fractions supplémentaires (fig. 5 A, C). Leur étude par électrophorèse montre que les hémoglobines ainsi séparées sont les mêmes que les fractions déjà décrites. L’explication la plus vraisemblable voit, dans ces fractions, la séparation de protéines non hémo-globiniques entraînant avec elles une certaine quantité d’hémoglobine.
2 Les hémoglobines du poussin de 1 à 4 jours
On trouve chez le poussin des hémoglobines qui paraissent, en première analyse, semblables aux fractions A13 A2 et A4 de l’adulte. En effet, leurs comportements électrophorétiques et chromatographiques paraissent analogues (tableau 1); cependant de plus amples vérifications employant des méthodes de comparaison plus fines doivent être réalisées avant que ces homologies puissent être considérées comme définitives. En revanche, la fraction A3 est absente et l’on trouve au moins deux fractions qui n’existent pas chez l’adulte, les hémoglobines et F.
Hémoglobine 
Nous la désignons provisoirement ainsi car elle est éluée en chromatographie sur CM-cellulose dans les mêmes conditions que la fraction A3 de l’adulte (tableau 1). Cependant elle diffère de celle-ci par son comportement électrophorétique. En gel d’amidon, elle fournit une bande très légèrement anodique alors que l’hémoglobine A3 est faiblement cathodique; l’électrophorèse d’un mélange de A3 et fournit deux bandes migrant de part et d’autre de l’origine (fig. 6). En gel de polyacrylamide, l’hémoglobine
prend une position intermédiaire entre celles des hémoglobines A2 et A3 de l’adulte. Elle représente chez le poussin de 1 jour environ 1% de l’hémoglobine totale.
Electrophorèse sur gel d’amidon des hémoglobines mineures A3 et de la Poule et du Poussin de 1 jour (tampon Tris 0,03 M ajusté à pH 8,0 par l’acide borique cristallisé).
Chromatographie sur DE-cellulose Serva d’un hémolysat de Poussin de 1 jour. L’hémoglobine F est directement eluée par le tampon de charge (Tris 0,01 M ajusté à pH 8,6 par N-HCI). A partir de la flèche G, élution par gradient linéaire de concentration (cf. tableau 1).
Chromatographie sur DE-cellulose Serva d’un hémolysat de Poussin de 1 jour. L’hémoglobine F est directement eluée par le tampon de charge (Tris 0,01 M ajusté à pH 8,6 par N-HCI). A partir de la flèche G, élution par gradient linéaire de concentration (cf. tableau 1).
Hémoglobine F
Elle est isolée au mieux par chromatographie sur DE-cellulose Serva qui présente pour cette fraction particulière un pouvoir séparateur supérieur à celui de la DE52 Whatmann (fig. 7). En électrophorèse sur gel d’amidon, elle migre comme la bande la plus cathodique fournie par un hémolysat de poussin (fig. 3 A). En électrophorèse sur gel de polyacrylamide, elle ne peut être mise en évidence dans les conditions que nous avons employées pour les autres hémoglobines. En effet, elle ne pénètre pas dans le gel espaceur et passe dans le tampon du réservoir supérieur. En revanche, lorsque l’électrophorèse est pratiquée selon la technique de Davis (1964), l’Hb F fournit une bande nette qui se comporte comme la bande la plus cathodique donnée dans ces conditions par un hémolysat de poussin (fig. 3C). Chez le poussin d’un jour, elle représente 6 à 7% de l’hémoglobine totale.
Le tableau 2 résume les proportions relatives des diverses hémoglobines contenues dans les hémolysats de poussin et de poule. Il apparaît que les proportions de Ai et A2 varient peu au cours du développement post-embryonnaire. Au contraire, l’hémoglobine A4 augmente après l’éclosion. On enregistre aussi, pendant cette période, la disparition de l’hémoglobine F et le remplacement de par A3.
DISCUSSION
Les méthodes que nous avons employées se distinguent de celles des auteurs par la filtration préalable des hémolysats sur Sephadex, l’emploi préférentiel de la chromatographie sur CM-cellulose et de l’élution par paliers discontinus de concentration. En électrophorèse sur gel de polyacrylamide, les conditions que nous employons produisent une meilleure résolution.
1 Les hémoglobines de T adulte
Sur DE-cellulose, nos résultats recoupent parfaitement ceux des auteurs (Huisman & Schillhorn Van Veen, 1964). Les deux constituants définis par ce mode de séparation migrent en électrophorèse selon des modalités déjà décrites et que nous pouvons confirmer (Kabat & Attardi, 1967; Manwell, Baker & Betz, 1966); ils se distinguent par leur composition en acides aminés (Saha, 1964; Manwell et al. 1966; Hashimoto & Wilt, 1966) et leurs groupements terminaux (Matsuda, Maekawa & Otsubo, 1965; Miyoshi, 1965). Mais nous avons vu que cette méthode de chromatographie fait disparaître les fractions Ai et A3.
Les auteurs qui ont utilisé la chromatographie sur CM-cellulose (Matsuda & Takei, 1963; Simons, 1966; Hashimoto & Wilt, 1966) ont opéré l’élution par des gradients linéaires de concentration. Ils séparent ainsi trois fractions qui pourraient correspondre aux trois constituants identifiés par certains auteurs à l’aide d’électrophorèse sur acétate de cellulose (Fraser, 1966) et d’immunoélectrophorèse (D’Amelio & Salvo, 1961). La fraction initiale obtenue par Hashimoto & Wilt se subdivise en deux bandes par électrophorèse alors que la nôtre est formée principalement d’hémoglobine Ax associée à quelques traces de A2. 11 est possible que les observations des auteurs qui décrivent cinq constituants (Hashimoto & Wilt, 1966; Marchis-Mouren & Lipman, 1965; Schall & Turba, 1963) soient dues à l’entraînement des hémoglobines par des fractions protéiques de nature différente. Dans cette hypothèse, on pourrait supposer que les fractions II et III obtenues par Hashimoto & Wilt contiennent respectivement les hémoglobines Ax + A2 et A3 + A4 identifiées par nos méthodes.
Notons enfin que l’électrophorèse sur gel d’amidon pratiquée à pH 8,3 et 8,6 fournit un plus grand nombre de constituants que lorsqu’elle est faite à pH 8,0 (Godet, 1967). L’état actuel de nos analyses conduit à penser que certaines de ces bandes peuvent correspondre à des séparations secondaires analogues à certaines de celles que fournit l’électrophorèse sur gel de polyacrylamide.
2 Les hémoglobines du poussin
Les observations de divers auteurs (Huisman & Schillhorn Van Veen, 1964; Manwell et al. 1966; Raunich, Callegarini & Cucchi, 1966; Salvatorelli, Callegarini, Gulinati & Gardenghi, 1968; Godet, 1967; Washburn, 1968) ont déjà montré que les jeunes poussins et les embryons âgés possèdent certains constituants hémoglobiniques différents de ceux de l’adulte. Nos résultats viennent confirmer ces conclusions en démontrant l’existence d’une hémoglobine foetale très différente des autres (HbF) ainsi qu’une hémoglobine mineure () très voisine de l’hémoglobine A3 de l’adulte.
L’existence d’une hémoglobine fœtale chez les Oiseaux a déjà été constatée chez le caneton par Borghese & Bertles (1965). Elle disparaît dans cette espèce deux mois après l’éclosion et se comporte de façon analogue à l’hémoglobine F du poulet.
Quant à la situation respective des hémoglobines A3 et , elle pose un certain nombre de problèmes intéressants. D’une part, le comportement de ces deux hémoglobines, identique en chromatographie, est très proche en électrophorèse. D’autre part, elles représentent respectivement dans les hémolysats de poussin et d’adulte des participations équivalentes en quantité. De sorte que l’hypothèse d’une parenté structurale et génétique entre ces deux constituants surgit d’elle-même. On pourrait supposer, par exemple, que ces deux hémoglobines résultent de l’activité d’une même unité génétique, modifiée par une altération limitée du processus de traduction. Des systèmes de cette nature ont déjà été envisagés dans certains cas pour les hémoglobines de lapin (Weisblum, Gonano, Von Ehrenstein & Benzer, 1965) et de souris (Rifkin, Rifkin & Konigsberg, 1966). Dans le cas des hé étation doit être considérée comme une simple hypothèse de travail à soumettre à des études ultérieures.
3 La nomenclature des hémoglobines de poulet
Il est certain que le nombre de travaux effectués en vue d’analyser les constituants hémoglobiniques de poule est actuellement élevé, que les techniques sont diverses et aboutissent à des résultats différents. On peut estimer que le progrès des analyses nous rapproche actuellement d’une description proche de la réalité exacte. A partir de ce moment, se pose le problème des homologies entre nomenclatures différentes, génératrices d’une confusion extrême.
Dans cet esprit, il nous a paru utile de présenter, dans le tableau 3, un résumé des principaux résultats décrits dans la littérature et concernant les hémoglobines de l’adulte. Nous n’avons pas tenu compte dans ce tableau des constituants hémoglobiniques cités occasionnellement par certains auteurs, considérés par eux comme des artefacts ou dont ils attribuent la formation à des conditions d’analyse particulière (Huisman & Schillhorn Van Veen, 1964; Manwell, Baker, Roslansky & Foght, 1963; Manwell, et al., 1966).
Principales données de la littérature concernant le nombre de constituants obtenus à partir d’un hémolysat de Poule

Notre opinion est que les observations présentant l’existence de deux ou trois hémoglobines tiennent, soit à un pouvoir résolvant insuffisant des méthodes employées, soit à la rétention, au cours de la séparation, de certaines hémoglobines présentes en faible quantité. Quant aux résultats présentant plus de quatre hémoglobines, ils pourraient découler de phénomènes d’entraînement par des protéines non hémiques, de l’altération de certains constituants ou d’équilibres plus ou moins réversibles entre des états différents d’une même molécule.
Nous fondons cette opinion sur le fait que, par les mêmes moyens qu’eux, nous avons pu obtenir des séparations analogues à celles des auteurs; un contrôle plus poussé des fractions obtenues nous a chaque fois restitué la séparation en quatre fractions. Notons enfin que les quatre constituants observés par Simons (1966) se distinguent des fractions que nous décrivons tant par leur mode d’élution en chromatographie que par leur participation respective dans l’hémolysat de Poule.
Les études faites sur la composition en acides aminés et sur les chaînes polypeptidiques constitutives des hémoglobines majeures (Saha, 1964; Manwell et al. 1966; Hashimoto & Wilt, 1966; Paul et al. 1968; Bargellesi, Callegarini & Conconi, 1969) suffisent dès à présent à nous assurer que ces deux hémoglobines correspondent à la traduction de cistrons différents. La question se pose désormais s’il en va de même pour les hémoglobines mineures (A1, A3 et A3) ou si celles-ci représentent en réalité des états transformés des hémoglobines majeures. Des études poursuivies au niveau de la structure primaire de la molécule sont seules susceptibles de répondre à cette question et présenteraient à coup sûr un intérêt tout particulier dans la comparaison des hémoglobines A3 et .
RESUME
L’hémolysat de poussin de 1 jour renferme cinq constituants: deux hémoglobines majeures A2 et A4 et trois hémoglobines mineures A15
et F.
Les hémoglobines A15 A2 et A4 sont également présentes dans l’hémolysat de poule. En revanche, chez l’animal adulte, l’hémoglobine
est remplacée par l’hémoglobine A3 et l’hémoglobine F a complètement disparu.
La nomenclature retenue, à la suite de ces observations, pour les hémoglobines de Poulet est comparée à celles données dans la littérature.
SUMMARY
The characterization andpost-embryonic development of the haemoglobins of the fowl
The 1-day chick hemolysate provides five fractions: two major haemoglobins A2 and A4 and three minor haemoglobins A1,A
and F.
Haemoglobins A15 A2 and A4 are also present in the hemolysate of the adult chicken; but, in the adult, haemoglobin A
is replaced by haemoglobin A3 and haemoglobin F disappears completely.
The nomenclature given here for chicken haemoglobins is compared with the nomenclatures found in the literature.